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MASERATI 3500

Acheter une MASERATI 3500 GT

Gilles Bonnafous le 17/10/2000

Présentée en mars 1957 au Salon de Genève, la 3500 GT marque le passage de Maserati à une nouvelle ère.

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Présentation

Après une longue période de purgatoire, qui l'a vu plonger dans l'indifférence, voire l'oubli du plus grand nombre, Maserati connaît aujourd'hui une juste renaissance. Ironie de l'histoire, la marque qui la remet en selle est celle qui, auprès des collectionneurs, l'avait étouffée de son ombre au cours des deux dernières décennies. Repris par Ferrari dans le giron du groupe Fiat, Maserati a lancé au salon de Paris de 1998 la 3200 GT, un modèle très réussi dont la carrière commerciale s'accomplit avec bonheur.

Juste renaissance, disions-nous. Car la prestigieuse firme de la via Ciro Menotti à Modène s'est couverte de gloire sur tous les circuits, aussi bien en monoplaces qu'en sport-prototypes. Un terrain où elle a plus d'une fois dominé Ferrari, notamment avec la sublime 250 F championne du monde de F1 aux mains de Fangio.

Tout à la fois pour rendre hommage à la marque au trident et fêter son retour en grâce, nous vous proposons un dossier sur la 3500 GT, le modèle qui en lançant vraiment Maserati sur le marché des GT de prestige a assuré son avenir.

MASERATI 3500 GT MASERATI 3500 GT

Genèse

C'est en 1926 qu'apparaît la première Maserati. Il s'agit d'un modèle de compétition, comme le seront toutes les voitures de la firme de Modène jusqu'à la guerre. Maserati ne commercialise des voitures de route qu'à partir de 1946, et encore ne sont-elles construites qu'en séries limitées et carrossées pratiquement sur mesure. Tel est le cas notamment des superbes A6 1500 et A6 GCS.

Présentée en mars 1957 au Salon de Genève, la 3500 GT marque le passage de Maserati à une nouvelle ère, celle de la construction en série et de la production industrielle – un effort nouveau partagé par la Carrosserie Touring. Lancée pour concurrencer Ferrari, notamment sur le marché américain, elle offre au constructeur son premier grand succès commercial. Son rôle historique apparaît d'autant plus important qu'elle va tout simplement permettre à la firme d'assurer sa survie à une époque où elle est gravement menacée. Ouvrant ainsi la voie à la Ghibli, et autres Indy et Bora.

Entrée en production au cours du second semestre 1957, la « Tipo 101 » est réalisée selon la technique Superleggera chère au carrossier milanais, dont la devise résume la philosophie : « Le poids est un ennemi, la résistance à l'air est un obstacle ». Elle a été mise au point sur la base des essais et tests effectués par Franco Cornacchia et Umberto Stradi. La tâche a consisté notamment à amalgamer les différents composants de la voiture dont beaucoup proviennent d'Angleterre, où l'ingénieur Giulio Alfieri a fait son marché dans le but de réduire les coûts.

Les évolutions

La 3500 GT bénéficiera au fil des années de quelques améliorations mécaniques, dont certaines s'imposaient. C'est le cas des freins à disques en série qu'elle reçoit à l'avant en 1960. Un pont autobloquant et une boîte de vitesses à cinq rapports complètent l'équipement en 1961. La voiture devient GTI en 1962 avec l'adoption de l'injection indirecte Lucas. Mais de réglage délicat, cette technique ne constitue pas à proprement parler un progrès. De sorte qu'il était fréquent de lui préférer à l'époque les trois carburateurs Weber double corps avec lesquels la 3500 GT était née.

Nombreux sont les carrossiers qui ont exercé leur talent sur le châssis de la 3500 GT. Allemano, Bertone et Frua ont proposé leurs propres interprétations du coupé, tandis que Touring et à nouveau Frua faisaient de même pour le cabriolet. Toutefois, c'est Vignale qui se voit confier la fabrication du cabriolet que Maserati décide de produire en 1961. Baptisé Spyder et présenté au salon de Paris de 1960, il doit sa ligne à Giovanni Michelotti. Construit sur un empattement raccourci de 10 cm (et doté de freins à disques à l'avant), il est alors considéré comme le précurseur d'une version plus sportive du coupé. Mais celle-ci ne verra pas le jour. Le Spyder sera produit jusqu'en 1963 à 242 exemplaires.

Modèle fondateur à bien des égards, la 3500 GT connaîtra dès 1963 une postérité aussi large que diversifiée. La première évolution est présentée au salon de Genève de 1962 sous l'appellation de coupé « S ». Cette 2 + 2, dont la silhouette sportive et trapue a été dessinée par Vignale, deviendra ensuite la Sebring. Construite sur l'empattement du cabriolet, donc plus courte que la 3500 GT, la voiture verra sa cylindrée passer à 3,7 litres, puis à 4 litres (255 ch). Suivra en 1964 la Mistral due au crayon de Pietro Frua, une deux places encore raccourcie (2,40 m d'empattement) et dotées des mêmes motorisations que la Sebring.

Design

Superbe réussite de la carrosserie Touring, une de plus dans une histoire riche en chef-d'œuvres, la 3500 GT offre au regard le remarquable équilibre de son profil. Longue et étroite, la voiture est puissamment campée sur des jantes de 16 pouces évocatrices de puissance. Une impression soulignée par les roues arrière largement dégagées. Mais le trait le plus étonnant de ce design inspiré est le traitement du pavillon. Basse et courte, sa forme sportive ne laisse en rien augurer d'une spacieuse 2 + 2. Or, la 3500 GT jouit d'une habitabilité arrière qui n'est pas loin d'en faire une vraie quatre places. Un réel tour de force !

La 3500 GT offre un remarquable cocktail d'esprit sportif et de discrétion classique, relevé de quelques notes de fantaisie du meilleur goût. Prioritairement destinée au marché d'outre-Atlantique, cette GT qui s'inscrit dans la pure tradition italienne se trouve pimentée de quelques attributs caractéristiques du design américain. Parfaitement réussie, cette synthèse esthétique — délicate à réaliser — préserve l'homogénéité du style et confère son charme unique à la voiture. A l'image du pare-brise panoramique et des ailerons à peine esquissés, mais terminés par des feux proéminents. Habile concession à l'air du temps, ceux-ci n'altèrent en rien le classicisme de la ligne, tandis que la lunette arrière panoramique conduit, par sa forte pente, à une poupe fine et élancée dont le dynamisme est souligné par une nervure centrale. A cette face arrière pleine de caractère fait écho une proue en gueule de poisson vorace, frappée en son centre de l'attribut de Poséidon.

L'esprit inventif dont témoigne la 3500 GT est illustré par de multiples détails dessinés avec autant de soin que de talent, à l'image de la belle prise d'air du capot ou des grilles décorant les flancs des ailes avant, ou encore des minuscules et délicates poignées de la malle arrière. D'une sobriété de bon aloi, la livrée bleue de la voiture qui nous a été confiée s'accorde à merveille avec l'esprit emprunt de distinction qui émane de la Maserati.

Fort heureusement, l'équilibre harmonieux de ce design ne sera altéré par aucun restyling. On notera simplement à partir de 1962 l'apparition de nouveaux clignotants rectangulaires.

Habitacle

Cossu et décoré avec un goût très sûr, l'habitacle révèle aussi une excellente qualité de fabrication. Quant aux sièges, ils offrent un remarquable confort et leur cuir noir d'origine, anobli par le temps, n'a rien perdu de son odeur caractéristique qui rappelle singulièrement les effluves des Lancia Flaminia. Installé tout à son aise, le conducteur apprécie l'agrément de la position de conduite, tandis que la taille impressionnante des pédales a le mérite de favoriser le talon-pointe.

Derrière le classique volant à trois branches au cœur décoré du trident, la planche de bord, également gainée de cuir noir, joue dans la catégorie grand sport si l'on en juge par l'impressionnante poignée de maintien qui en barre toute la moitié droite. Bien que fumer ne saurait constituer la préoccupation majeure du conducteur d'une 3500 GT, un imposant allume-cigare, tombant en outre sous la main, est le prétexte à un joli motif décoratif. Le superbe tableau de bord renseigne à l'envi sur la santé de la mécanique grâce à cinq petits cadrans circulaires disposés autour de la colonne de direction — ampèremètre, température d'eau, jauge d'essence, pression et température d'huile — et encadrés par le tachymètre et le compte-tours, dont la zone rouge est graduée à partir de 5000 tr/mn.

Loin d'offrir des places d'appoint, le compartiment arrière offre l'espace nécessaire à l'aisance de deux adultes — à condition qu'ils n'expriment pas leurs dons sur un terrain de basket. Son accessibilité est favorisée par les larges portières, bien que la faible hauteur du pavillon impose tout de même quelques contorsions… Pour améliorer l'aération d'un volume intérieur réduit, les passagers disposent d'un deuxième déflecteur placé à l'arrière des vitres (une adjonction réalisée en 1962). Marché américain oblige, ces dernières sont équipées de commandes électriques. Mais le confort se paie sur la bascule et, corollaire de cet aménagement sophistiqué, la Superleggera accuse le poids de 1300 kilos.

Mécanique

Dérivé du 6 cylindres de compétition de la Maserati 350 S, le superbe six cylindres à deux arbres à cames en tête et double allumage a été étudié par Giulio Alfieri. Il nous gratifie de son chant à la sonorité rauque et grave qui se mue, au-delà de 3500 tr/mn, en un grondement de tonnerre libéré par les deux énormes échappements. Ce soudain envol des décibels a le don de faire se retourner les passants, dont la carrosserie discrète de la voiture n'avait pas attiré le regard…

Rond et onctueux, ce moteur plein de ressources brille par sa souplesse et constitue, avec son design, l'atout majeur de la voiture. Favorisé par une longue course, le couple de 32 mkg offre à la mécanique une large plage d'utilisation. Cette remarquable disponibilité participe grandement au plaisir que l'on éprouve au volant de la 3500 GT. Ainsi, en quatrième, le 6 cylindres de Modène repart franchement dès 2000 tr/mn. C'est à partir de 3000 tr/mn que sa puissance se manifeste avec force, l'accélération s'avérant impressionnante à 4000 tr/mn. Grâce à ses 220 ch, la Maserati peut prétendre à une vitesse de pointe de l'ordre de 230 km/h. Par ailleurs, on ne manquera pas de souligner qu'à aucun moment, malgré une forte chaleur et des conditions intenses d'utilisation, le circuit de refroidissement n'a manifesté une température excessive. Une qualité très appréciable dont ne peuvent, hélas, se prévaloir certaines anglaises…

La voiture qui nous a été confiée est un millésime 1963. Elle était donc équipée à l'origine de l'injection Lucas. Mais compte tenu du caractère capricieux de cette dernière, le propriétaire a choisi de lui substituer les trois carburateurs Weber double corps avec lesquels le modèle est né en 1957.

La boîte de vitesses aux cinq rapports bien étagés se révèle d'un maniement agréable. Sa commande est précise et la courte grille favorise sa maniabilité, malgré des verrouillages durs et un petit levier — au pommeau frappé du trident — que l'on aimerait avoir mieux en main. Si la direction s'avère très lourde en manœuvres, elle jouit par contre d'un rayon de braquage étonnamment court.

MASERATI 3500 GT MASERATI 3500 GT

Sur la route

En ligne droite, la Maserati 3500 GT affiche une tenue de cap irréprochable. Et dans les courbes rapides, elle s'accroche sans difficultés, bien guidée par son train avant et malgré la présence d'un archaïque pont arrière rigide et de ressorts à lames. Ainsi éprouve-t-on un sentiment de grande sécurité, et il faut pousser la voiture relativement loin pour qu'apparaissent les limites de son comportement sous la forme de dérives du train arrière. Mais la belle n'est pas vache et prévient à l'avance par quelques glissements progressifs… Précise, quoique d'une grande fermeté, la direction favorise le contrôle de la situation.

Très à l'aise sur les grands espaces, la Maserati est par contre fortement handicapée par sa masse et son long empattement sur un parcours sinueux. Elle souffre alors d'une inertie certaine, cause d'un manque d'agilité particulièrement sensible sur les changements d'appui. Plutôt survireuse, elle se mue en sous-vireuse impénitente dans les entrées de virages serrés. Réalisé en majeure partie sur les petites routes des Vosges, notre journée d'essai mettra cruellement en lumière ce défaut. C'est peu dire que les enchaînements de esses ne constituent pas le jardin de la 3500 GT, et ne parlons pas des épingles à cheveux !

Le système de freinage mixte, disques à l'avant et tambours à l'arrière, remplit parfaitement sa mission. Et on ne saurait trop insister sur le remarquable confort procuré par l'amortissement de la suspension. En outre, on ne peut que louer la rigidité de la voiture qui, malgré son âge, passe brillamment le test des pavés. Par contre, vu les conditions de notre essai, la consommation se révélera tout bonnement astronomique (plus de 30 litres aux 100 km). Subvenir à la gloutonnerie des trois doubles Weber en sollicitant vivement la mécanique sur des ascensions de cols à répétition ne constitue certes pas une sinécure !

Il est des voitures que l'on quitte simplement à regret. S'agissant de la Maserati 3500 GT, c'est un vrai pincement au cœur que nous avons ressenti quand il nous a fallu « l'abandonner ». Particulièrement attachante, la Maserati 3500 GT est une voiture qu'on aime telle qu'elle est, avec ses qualités et ses défauts. Méconnue et encore sous-estimée en France, elle mérite à coup sûr un autre regard et une plus juste appréciation. Pour autant, et malgré son look de GT sportive, il ne faut pas la prendre pour ce qu'elle n'est pas. Loin des circuits et des records du tour, elle apparaît avant tout comme une grande routière cossue, confortable et puissante sinon très agile. Mais outre qu'il en fait l'une des plus belles 2 + 2 jamais construites, son design lui confère une personnalité rare et originale dans la famille des GT transalpines.

Note au lecteur : ce guide ayant été publié le 17/10/2000, les prix indiqués pour les pièces et la côte des véhicules risquent de ne plus refléter l'état actuel du marché.

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