Acheter une ALPINE GTA / A610 (1984 - 1995)
Stéphane Schlesinger le 17/10/2019
C'est peut-être grâce à son statut d'entreprise nationalisée que Renault a pu donner une descendance à l'Alpine A310.
Valeur à suivre
C'est peut-être grâce à son statut d'entreprise nationalisée que Renault a pu donner une descendance à l'Alpine A310. Car celle-ci n'ayant guère connu de succès, il pouvait s'avérer hasardeux de la remplacer, surtout que les finances de la Régie étaient très mauvaises quand les études de sa descendante, la future Alpine GTA, ont débuté, au début des années 1980. C'est Heuliez qui est choisi pour dessiner la carrosserie de cette sportive qui reprend la définition, l'architecture et le V6 2,85 l de sa devancière, en version Boulogne. Il s'agit donc d'une 2+2 à moteur en porte-à-faux arrière, dotée d'un châssis-poutre et d'une robe en synthétique. Pour offrir un comportement plus sûr que celui de l'A310, on porte une attention particulière à la répartition des masses, avançant la mécanique vers le centre de la voiture, afin de limiter à 60 % le poids exercé sur la poupe. L'aérodynamique est également soignée. On augmente la déportance de l'avant mais on se garde de trop faire de même à l'arrière, pour favoriser la stabilité à grande vitesse. Celle-ci est aidée par un Cx remarquable de 0,28 et surtout un SCx de 0,48, valeur qui n'a été surpassée que très récemment. Par ailleurs, le poids reste contenu, à 1 110 kg.
Quand les premières photos officielles de la V6 GT (le nom commercial de l'Alpine GTA) sont diffusées en février 1985, la modernité des lignes et l'aspect très lisse de ses surfaces surprennent. Mais si la poupe ne manque pas de caractère, la proue paraît étonnamment dénuée d'agressivité. Heureusement l'ensemble demeure très particulier. Il en va de même pour le tableau de bord, dessiné par Marcello Gandini, mais là, ça n'a rien d'un compliment. Et quand, au salon de Genève 1985, on découvre à quel point il est mal fabriqué, c'est la consternation. Le prix de 183 500 F (50 000 € actuels) compense quelque peu, une Porsche 944, par exemple, réclamant 200 440 F. La française est d'ailleurs plus performante, pointant à 235 km/h, une vitesse très élevée à l'époque. Surtout, elle se montre plus facile à maîtriser à la limite que sa devancière (tout en demeurant assez délicate), prodigue un grand confort et impressionne par son insonorisation. Mais l'image de marque alors tout aussi médiocre que sa finition, ainsi que son V6 PRV peu agréable, empêchent ses ventes de décoller. La version Turbo, lancée fin 1985, inversera-t-elle la tendance ? Elle récupère le V6 profondément modernisé qu'a étrenné la R25 Turbo. Doté de manetons décalés, il profite d'une douceur de fonctionnement nouvelle, et malgré sa cylindrée réduite à 2,5 l, offre 200 ch. Les performances font un bond en avant (260 km/h au maxi), le comportement progresse énormément et le prix raisonnablement : 221 000 F (60 500 € actuels). En gros, l'Alpine V6 Turbo bat une Porsche 911 Carrera face au chrono tout en coûtant 82 500 F de moins. Joli tour de force ! Pourtant, seuls 1 327 acheteurs s'offriront une GTA en 1986, le pic de sa carrière... Refroidi, Renault gèle ses évolutions, le modèle adapté au marché US (à projecteurs escamotables) n'étant même pas commercialisé. Tout au plus note-t-on deux séries limitées : la 1000 Milles en 1989 (100 exemplaires), signalée par son intérieur tout cuir (même le tableau s'en couvre), sa couleur rouge, ses jantes polies et le coin avant gauche du capot revêtu d'un sticker blanc, et en 1990, la Le Mans dotée d'un kit carrosserie très réussi (325 exemplaires).
Elles ouvrent la voie à l'Alpine A610, qui remplace l'Alpine GTA, fabriquée en tout à 6 494 exemplaires, dont environ 5 000 Turbo. L'Alpine A610 emprunte beaucoup à la GTA US : projecteurs occultés, structure avant et portières renforcées. Elle ajoute un moteur porté à 3,0 l et 250 ch, des trains roulants améliorés, des retouches de carrosserie et un cockpit remanié. Mais pas assez vu le prix en très forte hausse : 405 000 F (92 000 € actuels). Aussi, même s'il s'agit d'une sportive de très haut niveau, plus performante et efficace qu'une 911 Carrera 2, elle ne se vend pas. Et les séries spéciales Albertville 92 et Magny-Cours n'y changeront rien. Fin 1995, elle disparaît, produite à 818 exemplaires... Il est temps de redécouvrir ces Alpine, performantes, très particulières et autrement plus rares que la sempiternelle 911.
Note au lecteur : ce guide ayant été publié le 17/10/2019, les prix indiqués pour les pièces et la côte des véhicules risquent de ne plus refléter l'état actuel du marché.