Essai MASERATI Quattroporte GTS
Vincent Desmonts le 24/11/2013
La Maserati Quattroporte continue de défendre l'étendard italien face à une indéboulonnable concurrence allemande. Mais cette sixième génération possède-t-elle encore un supplément d'âme ?
Vœu d'originalité
C'est vrai, il n'y a pas que le sempiternel triumvirat allemand dans le haut de gamme : certaines marques tentent vaillamment de résister au blitzkrieg d'Audi, BMW et Mercedes en proposant une alternative, une conception différente du luxe et du plaisir.
Parmi ces Don Quichotte du haut de gamme, Maserati tient une place particulière : depuis six générations, sa Quattroporte défend les couleurs de la GT à l'italienne, élégante et de caractère. Mais si les A8, Série 7 et autres Classe S se vendent aux quatre coins du globe comme des petits pains, la diffusion de la limousine Maserati a toujours été confidentielle. Un choix d'amateur éclairé, en somme.
Reste que la firme de Modène n'a pas l'intention de rester dans ce (très relatif) anonymat : depuis l'alliance de Fiat avec Chrysler, Maserati voit en effet grand, très grand ! Outre cette nouvelle Quattroporte, la gamme va s'enrichir également d'une berline de taille inférieure, la Ghibli, ainsi que d'un SUV, le Levante. Sans oublier, bien entendu, l'arrivée des motorisations diesel. Je vois d'ici les puristes prendre leurs jambes à leur cou !
Mais, à la manière de Porsche, qui a connu un développement sans précédent grâce au succès du Cayenne, cet élargissement de la gamme doit permettre à Maserati de gagner une certaine autonomie financière. Et, bien sûr, de fortement augmenter ses ventes. D'un peu plus de 6 000 unités par an aujourd'hui, elles doivent ainsi passer à... 50 000 d'ici à 2015 !
Rebattre les cartes
Cette sixième génération de Quattroporte est en tous cas la bienvenue, puisque la précédente, lancée en 2004, commençait à accuser un certain retard technologique sur la concurrence. Premier constat : les dimensions sont en nette hausse !
La Quattroporte mesure désormais 5,26 mètres de long, soit 16 cm de plus que le modèle précédent. La largeur atteint les 1,95 mètres, tandis que la hauteur reste contenue, à 1,48 mètre. Une crise de croissance qui permet de rebattre les cartes dans la gamme : la Quattroporte laisse ainsi de l'espace à la « petite » Ghibli, qui mesure 4,97 mètres.
Côté style, elle évolue en douceur, conservant les courbes séductrices de sa devancière, mais en rajeunissant ses traits. L'interminable capot bombé et la calandre proéminente composent une face avant à fort caractère, tandis que les flancs joliment sculptés confèrent à la Quattroporte l'élégance d'un dauphin. Les « gimmicks » comme le logo Maserati sur le montant C ou les ouïes latérales sur les ailes avant sont toujours là. C'est finalement à l'arrière que la Quattroporte évolue le plus, avec des feux horizontaux reliés par un jonc chromé.
Beaucoup d'espace, mais une finition décevante
À l'ouverture des portières (dotées de vitres sans encadrement), la joie est cependant de courte durée. Certes, le dessin de la planche de bord est plutôt agréable à l'œil, et l'habitabilité est généreuse (grâce à l'allongement, Maserati annonce une augmentation de 105 mm de l'espace aux jambes à l'arrière!). Les aficionados retrouveront leur pendulette au sommet de la console centrale et leurs palettes fixes derrière le volant.
Mais côté finition, la Quattroporte n'a pas fait assez d'efforts : les plastiques choisis manquent de classe pour un modèle affiché près de 150 000 €. Quant au Maserati Touch Control, le système d'info-divertissement doté d'un écran de 8,4 pouces, il affiche des graphismes datés et une ergonomie perfectible. Heureusement, l'équipement de série est complet, avec notamment assistant feux de route, clé mains libres et vitrage feuilleté pour une meilleure insonorisation.
Toujours un V8, mais « downsizé » !
C'est surtout en soulevant le capot qu'on se console : si la Quattroporte a consenti à adopter des moteurs V6 essence et diesel pour élargir sa clientèle, sa version haut de gamme reste fidèle au V8 ! Mais ce bloc-là n'a plus rien en commun avec le précédent bloc huit cylindres. Conçu par Maserati et assemblé chez Ferrari, le nouveau V8 n'affiche que 3,8 litres, contre 4,7 litres pour son prédécesseur. Mais il se dote d'une injection directe et de deux turbocompresseurs pour compenser ! Résultat : puissance et couple augmentent fortement, avec 530 chevaux et 650 Nm dès 2 000 tr/min.
Dans le détail, ce nouveau V8 conserve un profil supercarré, avec une course courte (80,8 mm pour un alésage de 86,5 mm), mais adopte un quadruple calage variable des arbres à cames. Les turbos de type « twin scroll » (double entrée) sont de petite taille et intégrés aux collecteurs d'échappement afin de réduire le temps de réponse. La boîte est la désormais bien connue ZF 8HP, automatique à huit rapports, tandis que le différentiel arrière est autobloquant.
Enfin, la ligne d'échappement intègre des clapets à commande pneumatique afin d'offrir à cette italienne une sonorité digne de son blason. Par contre, le « downsizing » à la sauce de Modène n'est pas hyper-efficace : si le nouveau V8 biturbo est plus efficient que l'ancien moteur atmosphérique, il reste cependant à bonne distance des mécaniques allemandes. Ainsi, la Mercedes S 63 AMG, pourtant plus puissante de 55 chevaux, revendique-t-elle une consommation mixte inférieure de 2 litres aux 100 km !
Éducation à peaufiner
Parmi la belle dotation de série de la Quattroporte, deux équipements en particulier s'avèrent rapidement indispensables : les radars de stationnement et la caméra de recul ! Manœuvrer l'imposante limousine dans les parkings souterrains est en effet une épreuve cruelle pour les nerfs. Heureusement, la direction douce facilite un peu le travail.
Une fois sur la route, la Maserati se révèle en outre étonnamment confortable, grâce à son amortissement piloté Skyhook. On peut même parler d'une grande souplesse, qui contribue activement à la quiétude à bord. Sous le capot, le V8 biturbo ronronne chaleureusement. Hélas, l'agrément quotidien est entaché par de trop fréquents à-coups en provenance du différentiel arrière, ainsi que par une pédale de frein collante qui rend le dosage peu aisé sur les derniers mètres de décélération.
Enfin, la consommation très élevée (11,9 l/100 km en cycle mixte... mais pas loin du double dans la réalité!) fait que le réservoir de 80 litres est rapidement siphonné. Bref, côté pile-limousine, la Quattroporte gagnerait à arrondir un peu les angles.
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Un caractère attachant
Côté face-sportive, la Maserati convainc déjà plus. Par ses performances, d'abord : le 0 à 100 km/h en 4,7 secondes reste impressionnant, même si une Audi S8 fait mieux grâce à son Quattro (4,1 secondes !), et une Mercedes S 63 AMG grâce à sa puissance (4,4 secondes). Côté vitesse maxi, l'italienne ne s'impose pas les brides chères aux allemandes : elle affiche crânement ses 307 km/h en pointe ! Le châssis digère sans trop de mal la cavalerie du V8 biturbo, et dévoile un bel équilibre ainsi qu'une rassurante progressivité à l'approche des limites d'adhérence.
Enfin, le chant du moteur est plaisant, notamment lorsque l'on active le mode « Sport », qui ouvre en permanence les clapets de l'échappement. À l'inverse, lorsque les routes sont très glissantes, la Quattroporte propose un mode baptisé « ICE » (pour « increased control efficiency »), qui modère les velléités du moteur et incite la boîte auto à passer les rapports le plus tôt possible.
Malgré tout, la direction manque un peu de feeling, bien que Maserati ait préféré conserver une assistance électro-hydraulique plutôt que d'adopter les variantes purement électriques qui fleurissent partout et donnent rarement pleine satisfaction. En outre, le nez apparaît encore un peu lourd à l'inscription, ce qui laisse penser que le poids à vide annoncé par le constructeur (1 900 kilos) est quelque peu optimiste. Mercedes revendique d'ailleurs 70 kilos de plus sur sa S 63 AMG...
Bref, la Quattroporte laisse un certain sentiment d'inachevé. Malgré tout, elle réussit le coup classique des italiennes : en dépit de ses défauts, elle finit par insensiblement séduire au fil des kilomètres. On s'attache à son caractère mécanique, à sa ligne sculpturale, à son confort douillet. Reste que son tarif reste assez corsé : à presque 150 000 €, elle est 16 000 € plus chère que la très aboutie Audi S8...
À retenir
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20
- Accélération
- Reprises
- Direction
- Agilité du châssis
- Position de conduite
- Commande de boîte
- Etagement de la boîte
- Adhérence
- Freinage
- Equipements de
sécurité
- Habitabilité
- Volume du coffre
- Visibilité
- Espaces de rangement
- Confort de suspension
- Confort des sièges
- Insonorisation
- Qualité (matériaux, assemblage, finitions)
- Rapport prix/prestations
- Tarif des options
- Consommation