Acheter une LANCIA GAMMA
Stéphane Schlesinger le 10/05/2021
Une mise au point hâtive a empêché la superbe Gamma Coupé de connaître le succès. Mais on sait la fiabiliser et profiter de ses immenses qualités, qui demeurent peu onéreuses.
Beauté pas si fragile
Quand Fiat rachète Lancia en 1969, cela engendre des grincements de dents chez le second. Fiat en contrôle rigoureusement les dépenses, ce à quoi on n'est pas habitué chez Lancia ! Premier fruit de cette absorption, la Beta, sortie en 1972, doit beaucoup à Fiat dont elle adopte les moteurs et les contraintes de coût, abandonnant ainsi la fabrication onéreuse à la Lancia…
Sacrilège ! Aussi, pour la remplaçante de la Flavia, certains chez Lancia décident de ne pas se laisser faire par le géant turinois. Alors qu'il était logiquement envisagé de doter la future Gamma du V6 de la Fiat 130, on décide de lui offrir un inédit et spécifique 4-cylindres à plat. Seulement, les conflits durant la conception s'éternisent et le temps commence à manquer. Pire, une loi est introduite en Italie qui taxe à 35 % les voitures de plus 2,0 l de cylindrée. En catastrophe, on développe une version réduite du flat-four, et la fiabilisation du moteur est bâclée. Dommage, car la suspension développée par l'ingénieur Camuffo et étrennée sur la Beta donne des résultats excellents sur la Gamma. Quand elle sort, en 1976, celle-ci est d'ailleurs félicitée pour ses qualités dynamiques remarquables, alors que les spécialistes critiquent le fait qu'elle ne dispose que de 4 cylindres. Sa carrosserie étonne : une bicorps signée Pininfarina et découlant du concept aérodynamique BMC 1800 présenté par ce dernier en 1967.
Simultanément, Pininfarina dévoile un coupé, bien plus classique par sa formule tricorps et ses lignes très élégantes. Non prévu, il ne sera commercialisé qu'en 1977. Mais à 89 800 F en 1978, soit environ 48 000 € actuels, il est cher. Aussi, malgré ses qualités, il se vend mal. Pire, les problèmes de fiabilité apparaissent rapidement : le moteur casse car la courroie de distribution gauche, entraînant trop de périphériques dont la pompe de direction assistée, saute parfois si on démarre les roues braquées, alors que la pression d'huile insuffisante entraîne des déjaugeages en virage.
N'oublions pas les soucis de refroidissement, dus à un thermostat défectueux. L'usine corrige ces défauts trop lentement, et la Gamma s'affuble d'une réputation de fragilité qui ruinera sa carrière. Et ce, même si en 1980 le moteur subit une rafale de 250 modifications, dont l'adoption d'une injection électronique, alors que calandre et habitacle sont modifiés. La Gamma, berline et coupé, termine sa carrière en 1984. 2 337 coupés 2,5 l phase 1 et 1 209 phase 2 sont produits : un échec cuisant pour la dernière vraie Lancia.
Au volant
La ligne ciselée de la Gamma Coupé demeure un ravissement pour l'œil. Le tableau de bord, banal et fabriqué dans un plastique quelconque, beaucoup moins. Grâce au volant réglable en hauteur, on trouve une bonne position de conduite, mais à cause d'un enrouleur qui se bloque sans arrêt, la ceinture est difficile à boucler. Pourtant, rapidement, la voiture régale par ses qualités. Un peu bougon à bas régime, le moteur gagne en douceur en prenant des tours, tout en émettant un son sympa. Allègre plus que vraiment puissant, il est secondé par une boîte très agréable à manier. Mais le plus impressionnant reste le châssis. Déjà, la direction se montre précise et consistante.
Ensuite, la suspension concilie à haut niveau confort et maintien de caisse. Enfin, grâce au moteur à plat qui abaisse le centre de gravité, l'auto profite d'un comportement relativement neutre, l'arrière acceptant de se placer si on le provoque. On peut brusquer la Gamma, elle adore, sans jamais se désunir. Enfin, les freins sont très efficaces. En somme, la Lancia est une auto très agréable et dynamique, qui permet de se faire plaisir en famille grâce à sa bonne habitabilité.
Avenir
Désastreuse au départ, la fiabilité de la Gamma s'est améliorée au fil des ans, devenant convenable à partir de 1979. Mais gare à la corrosion et aux facéties électriques ! En outre, les pièces sont difficiles à trouver. La cote du coupé ne s'envole pas. Elle s'est rapidement effondrée, et a stagné depuis des années dans les 30 000 F, puis les 5 à 6 000 € avec le passage à l'euro. Les meilleurs exemplaires ne dépassent presque jamais les 10 000 €, en phase I ou II, cette dernière semblant préférable, car plus rare et fiable, tout en se montrant à peine plus chère. Cela dit, la valeur semble s'apprécier.
Evolution
1976 : Présentation de la Gamma à Genève, en berline et en coupé.
1977 : Le coupé entre en production.
1979 : Modifications apportées au moteur, dont des queues de soupapes épaissies.
1980 : Léger remaniement esthétique et passage à l'injection électronique.
1984 : Fin de production.
Trois points clés
- Ligne superbe
- Châssis remarquable
- Cote en hausse
Note au lecteur : ce guide ayant été publié le 10/05/2021, les prix indiqués pour les pièces et la côte des véhicules risquent de ne plus refléter l'état actuel du marché.