Acheter une JAGUAR XKR Mk1
Thomas Riaud le 20/06/2017
S'offrir pour moins de 30 000 € un joyau de la couronne proposant une ligne racée, un V8 de plus de 300 ch, le tout accompagné d'un blason prestigieux, a de quoi susciter des vocations. Telle est la promesse de la première Jaguar XKR.
« Félin » pour l'autre ?
Généalogie
La vie de Jaguar ne fut pas toujours un long fleuve tranquille, avec des hauts et des bas, y compris en matière de GT. Des sommets aussi bien sûr, avec la mythique Type-E, puis le déclin, avec l'incomprise XJS, née au sein de la nébuleuse BMC (British Motors Corporation), en plein choc pétrolier. Bonifiée sur la tard après le rachat par Ford, la XJS, pensée pour séduire d'abord les USA, eu pourtant une carrière exceptionnellement longue de plus de 21 ans ! Cela nous amène en 1997, année où déboule sa remplaçante : la XK8. Malgré son V8 4.0 atmosphérique, elle ne peut renier ses influences félines et british, avec sa « bouche ovale » sensuelle et ses galbes élégants au niveau des ailes. Dès 1998, le dérivé sportif « R » est introduit, le V8 gagnant une suralimentation par compresseur, la puissance passant de 294 ch à 375 ch ! Proposée en coupé et en cabriolet 2+2, la méchante XKR se distingue par l'adoption d'un long capot garni de prises d'air, d'une calandre grillagée, d'un petit becquet arrière et de jantes de 18 pouces. En octobre 2000, Jaguar remet à niveau sa GT (feux xénon, contrôle de stabilité DSC...), et fin 2003, la cylindrée passe à 4.2 litres (avec calage variable en continu de l'admission, nouvelle boîte automatique ZF à 6 vitesses et plus à 5 rapports), la puissance de la XKR culminant à 396 ch. Autre innovation : l'introduction d'un amortissement adaptatif (option), tandis que l'auto reçoit, de série, quelques équipements supplémentaires (radar de recul, feux à effet cristal...). En avril 2004, cette GT reste inchangée sur le plan mécanique, mais profite d'un léger restylage (pare-chocs, prises d'air, suppression des baguettes latérales...), lui permettant de patienter jusqu'à sa retraite, en mai 2006.
Identification
Le numéro de châssis est visible depuis l'extérieur sur une plaque métallique, en bas du pare-brise, côté conducteur. Ce même numéro (qui doit figurer sur la carte grise) est visible dans l'embrasure de la porte-conducteur, sur un autocollant.
Intérieur et équipement
Si aujourd'hui une Jaguar « sport » fait largement appelle aux inserts black piano, voire aluminium ou carbone, ce n'est pas le cas de cette génération de « R », très « old school », avec une profusion de cuir et de bois. Bien que de nombreux éléments proviennent de la banque d'organe Ford (clé de contact, commodos…), l'ensemble fait bonne impression. Evidemment, comme toujours, les intérieurs clairs restent plus vulnérables que les foncés, et sur le cabriolet, un examen encore plus attentif s'impose (y compris le bon état et fonctionnement de la capote électrique). Seule faiblesse récurrente : les bourrelets latéraux des sièges avant s'usent suite aux contacts répétés (traces de frottements). Quant à l'électronique embarquée, elle ne présente aucun dysfonctionnement particulier. Seul rappel effectué par Jaguar : un remplacement de la pédale d'accélérateur (sur modèles 2005-2006). Enfin, malgré un gabarit imposant (4m76), sachez que la rapport encombrement-habitabilité est décevant, seules les places avant étant logeables dans cette GT 2+2...
La technique
Châssis et carrosserie
A l'instar de l'Aston Martin DB7, la XK8 (et XKR) est construite sur le châssis de l'ancienne XJS. La carrosserie, en acier, présente l'avantage d'être réparable chez n'importe quel bon carrossier en cas d'accrochage (contrairement à l'aluminium). La XKR est suffisamment moderne pour bénéficier d'un traitement anticorrosion digne de ce nom, vous mettant à l'abri de la rouille (dans le cas contraire, méfiance : il y a eu sans doute un choc mal réparé). Sachez que les pare chocs peints (en composite) sont équipés d'une poutre de renfort en fibre, qui ne supporte pas le « pousse-pousse » de stationnement en ville. Enfin, l'auto étant basse, auscultez bien les soubassements, notamment l'échappement, assez vulnérable et cher.
Motorisation et transmission
Conçu conjointement par Ford et Jaguar, ce V8 4.0 (puis 4.2) réputé solide, fera le bonheur de nombreux Range (et Aston) de la même période. Bonne nouvelle : la distribution est assurée par une chaîne ! Mauvaise nouvelle : jusqu'en 2000, les galets des tendeurs, en bakélite, peuvent se craqueler (surtout lors de longues immobilisations), ce qui impose leur remplacement, par précaution, tous les 60 000 km environ (compter 600 € pièces et main d'œuvre chez un bon spécialiste). Et à 200 000 km, il faut refaire toute la distribution. Le bloc dégageant beaucoup de chaleur, le refroidissement est essentiel (vérifiez les durites et le thermostat). Les pompes à eau sont fragiles jusqu'en 2000, ce qui n'est pas le cas de celles de 3ème génération, disposant d'ailettes en aluminium (à installer en 2ème monte si ce n'est pas le cas). Enfin, le compresseur Eaton M90 est réputé solide, mais ses joints d'étanchéité peuvent se montrer poreux (bruit suspect de « cornet » à l'aspiration). Plus bourgeoise dans l'âme que réellement sportive, cette propulsion ne reçoit que des boîtes automatiques à convertisseur (à schéma en « J »). Du lancement à 2002, celle-ci est à 5 rapports, et est d'origine Mercedes. Bien que réputé solide, cela ne l'empêche pas d'avoir connue quelques déboires (depuis résolus), puisque Jaguar a diligenté un rappel (suite à une mauvaise sélection des rapports). A partir de 2002, une ZF à 6 rapports plus réactive (et aussi solide) prend le relais. Mais contrairement aux préconisations de Jaguar, une vidange est recommandée, tous les 64 000 km (avec remplacement de la crépine) : comptez 350 € avec l'huile d'origine Jaguar.
Suspensions et trains roulants
En coupé, et pire encore, en cabriolet, la XKR est une lourde GT (1815 kg), ce qui met à mal les trains roulants, notamment les pneus. Leur taille étant respectable (245/40 R 18 à l'avant et 255/40 R 18 à l'arrière), cela n'est pas sans conséquence sur le budget en cas de conduite sportive (280 € pour un pneu avant et 480 € environ pour un pneu arrière !). Les roulements arrière sont par ailleurs réputés fragile (à changer tous les 80 000 km environ). Idem pour les les silents-blocs de la barre stabilisatrices, à remplacer à partir de 150 000 km. Quant aux amortisseurs (à remplacer vers 100 000 km), la XKR a commencé sa carrière avec du classique en la matière, puis a adoptée en 2002 des modèles pilotés CATS (optionnels), plus efficaces pour juguler le roulis, mais plus chers à remplacer (450 € pièce contre 250 € en « classique »). Le budget « freins » est plus raisonnable, puisqu'un jeu de disques avant est facturé 280 € (et 90 € pour les plaquettes). Bien sûr, l'usure de ces périssables dépend, comme toujours, étroitement de la conduite adoptée.
Direction, freinage et tenue de route
La XKR, c'est un félin à pattes de velours capable de sortir les crocs lorsque l'on chatouille l'accélérateur ! Très discrète en roulant sagement au couple, la XKR ronronne paisiblement comme un gros matou au coin du feu. Elle se laisse alors conduire du bout des doigts, en finesse et en douceur, la direction assistée participant beaucoup à cette ambiance feutrée. Une direction qui se fait heureusement précise quand le rythme s'accélère, chose aisée tant le V8 déborde de couple. La XKR séduit par ses belles qualités routières, et se montre sûre à toutes les allures (freinage compris !) si la route est large, en bon état… et sèche. Sur un revêtement irrégulier, étroit et humide, il conviendra au contraire de prendre quelques précautions pour ne pas se laisser surprendre, cette lourde et puissance propulsion ayant alors un caractère survireur marqué. Et oui, le sport n'est pas la tasse de thé de cette GT...
Tout savoir avant d'acheter
Fiabilité et coûts d'entretien
Qu'on se le dise : cette anglaise est fiable si elle est bien traitée ! Cela impose de bien laisser monter en température le moteur avant de le solliciter, et de lui prodiguer un entretien suivi (vidange tous les 10/12 000 km ou une fois par an : comptez 480 € de petite révision). Une fois sur deux, il faut remplacer, en plus, les bougies et le filtre à air (970 € environ). Les catalyseurs des échappements peuvent s'encrasser si la conduite fréquemment adoptée est trop paisible (sur 20% des véhicules, vers 100 000 km), notamment pendant de courts trajets urbains, et que l'utilisateur met en plus du SP95 (1600 € pièce, hors main d'œuvre). Ce phénomène est plus marqué sur les modèles provenant de l'étranger (mauvaise essence, ou indice d'octane différent).
Maintenance classique : coûts des interventions (main d'œuvre comprise)
Intervention | Prix TTC en € | Fréquence |
---|---|---|
Distribution | chaîne (2200 € avec poulie, tendeurs, galets) | 200 000 km |
Embrayage | bva | - |
Pneus AV/AR | 650 € - 1100 € (18'') | vers 20 000 km |
Amortisseurs AV/AR | 1200 € par train (piloté) | vers 100 000 km |
Disques AV/AR | 400 / 350 € | vers 60 000 km |
Plaquettes AV | 120 € le jeu | vers 30 000 km |
Echappement complet | 2500 € (hors catalyseurs) | plus de 200 000 km |
Révision générale | 480 € (970 € la grosse) | tous les 10 000 km / 1 an |
Les points essentiels
- Galets des tendeurs de chaîne de distribution en bakélite pouvant se craqueler jusqu'en 2000 (surtout lors de longues immobilisations)
- Pompes à eau fragiles jusqu'en 2000 (à remplacer par modèle doté d'ailettes en aluminium)
- Joints d'étanchéité du compresseur Eaton M90 pouvant se montrer poreux (bruit suspect de « cornet » à l'aspiration)
- Bourrelets latéraux des sièges avant s'usant suite aux contacts répétés (traces de frottements)
- Remplacement de la pédale d'accélérateur (sur modèles 2005-2006) ayant occasionné un rappel
- Catalyseurs des échappements pouvant s'encrasser en cas de conduite urbaine trop fréquente (concerne 20% des véhicules, vers 100 000 km)
- Sans plomb 95 et longues immobilisations à proscrire ! Entretien régulier de rigueur !
Note au lecteur : ce guide ayant été publié le 20/06/2017, les prix indiqués pour les pièces et la côte des véhicules risquent de ne plus refléter l'état actuel du marché.