Acheter une JAGUAR MK 2
Gilles Bonnafous le 27/03/2006
Archétype de la culture automobile d'outre-Manche, la personnalité unique de la Mk 2, synthèse d'élégance, de confort raffiné et d'esprit sportif, a élevé la plus britannique des berlines au niveau d'un mythe universel.
La Mk 1, première monocoque Jaguar
Conçue pour combler le vide existant entre les modèles sportifs et l'opulente berline de haut de gamme, la Mk 1 voit le jour en septembre 1955. Compacte, basse et ramassée, elle rompt avec le gabarit des majestueuses Mk VII-Mk IX, par rapport auxquelles elle abandonne quarante centimètres en longueur (et 300 kilos !). Programmée comme modèle économique (dans le contexte de la firme), elle se voit dotée d'un moteur de cylindrée moyenne. Extrapolé du célèbre XK, ce groupe de 2,4 litres sera préféré au quatre cylindres de deux litres du roadster XK 100 mort-né, dont on avait envisagé le montage. Baptisée prosaïquement 2,4 litres, elle recevra a posteriori l'appellation de Mk 1 pour la commodité de l'usage et par référence à la Mk 2.
Première monocoque de la marque, la nouvelle " petite " Jaguar constitue une révolution à Browns Lane. Car, à l'image de Rolls-Royce, Jaguar n'apparaît pas à la pointe du progrès et l'on rappellera que Vauxhall avait adopté cette technique moderne de construction dès avant la guerre - et Ford Dagenham à partir de 1950. Marque de prudence de la part des ingénieurs de Coventry, la voiture est équipée d'un faux châssis à l'avant et d'importants renforts de soubassement.
Le groupe de 2,4 litres n'est autre que le moteur XK, dont la course a été réduite, faisant de ce bloc une mécanique super carrée. Alimenté par deux carburateurs Solex - une infidélité de Jaguar à la marque SU dans un souci d'économie de consommation, du reste assez mal récompensé -, il développe la maigre puissance de 112 ch SAE (en réalité 90 ch DIN). C'est bien peu pour emporter les 1400 kilos de cette berline, d'où des accélérations que nous qualifierons de paisibles et une vitesse maximum de 160 km/h.
En mars 1957, soit deux ans seulement après son lancement, la Mk 1 franchit un pas décisif. Elle reçoit le moteur XK de 3,4 litres qui, avec deux carburateurs SU, développe 210 ch. Parallèlement à la boîte Moss, la voiture reçoit en option la transmission automatique Borg-Warner à trois vitesses. Le pont arrière a été renforcé pour affronter la nouvelle cavalerie, et la voiture, qui atteint maintenant les 190 km/h, bénéficie, en option, de quatre freins à disques Dunlop. Répondant aux vœux de Sir William Lyons, la Mk 1 prend les chemins des marchés extérieurs, surtout des Etats-Unis (près de la moitié de sa production est exportée). Elle s'efface en septembre 1959, après une diffusion totale de 37 397 exemplaires.
La Mk 2 et l'avènement d'un chef d'œuvre
C'est dans le cadre du Salon d'Earl's Court, en octobre 1959, qu'est présentée la Mk 2, où elle est proposée dans les trois cylindrées de 2,4 litres, 3,4 litres et 3,8 litres. Les retouches apportées à un design originel se traduisent généralement par la dégénérescence des formes. Au contraire, Jaguar a réussi à moderniser la ligne de la Mk 1 tout en conservant à la nouvelle voiture le caractère de son aînée. En allégeant les lignes du pavillon, la marque est même parvenue à lui donner un nouvel élan esthétique.
De fins encadrements de vitres en laiton chromé et une lunette arrière élargie transforme l'habitacle en lui apportant un supplément de lumière. Ceci donne naissance à un nouveau panneau de custode échancré par les larges déflecteurs arrière, dont la courbe vient frôler celle de la lunette. Sur la face avant, des phares antibrouillard viennent en lieu et place des grilles de la Mk 1, tandis que des clignotants circulaires apparaissent sur le devant des ailes, désormais surmontées d'une petite veilleuse. Les feux arrière légèrement plus volumineux constituent la seule modification apportée à la poupe.
Original et intemporel, le design de la voiture s'inscrit toutefois dans la filiation esthétique de la marque depuis 1948. A l'image de l'XK 120, sa glorieuse et sportive aînée, la Mk 2 offre un concerto de courbes et de galbes, une partition dans laquelle brille Jaguar. Aucune mièvrerie dans ces rondeurs, bien au contraire. La Mk 2 compose un cocktail racé d'agressivité et de douceur qui fait son charme.
Véritable salon roulant, l'habitacle offre un festival dont profitent tous les sens. Si le regard et le toucher sont comblés par les boiseries, l'odorat ne se trouve pas moins flatté par le parfum du cuir. Les jambes trouvent généreusement leur place à l'avant comme à l'arrière, quoique la surface plane des larges et confortables sièges ne favorise pas le maintien latéral. Le passager se trouve-t-il passablement malmené par la force centrifuge… Le capot plongeant offre une excellente visibilité qui s'étend sur les côtés et vers l'arrière grâce aux vitres en arc de cercle et à la lunette panoramique. Le regard tombe droit sur le compte-tours et le tachymètre, alors que le tableau de bord central regroupe les cadrans de température d'eau et de pression d'huile, ainsi que la jauge d'essence et l'ampèremètre.
Mécanique brillante et transmission archaïque
Le moteur de 2,4 litres est porté à 120 ch par le montage de la culasse B à soupapes plus larges, tandis que le 3,4 litres demeure inchangé. Quant au bloc de 3,8 litres équipant déjà la Mk IX et l'XK 150, il dérive du 3,4 litres, qui a été réalésé de quatre millimètres et par rapport auquel il ne gagne que 10 ch. Par contre, le couple progresse à 33,2 mkg et représente le seul véritable avantage sur le 3,4 litres. En option, ce moteur peut être équipé de la culasse Straight Port due à Harry Weslake, dont les trois carburateurs font passer la puissance à 265 ch, toujours à 5500 tr/mn.
La transmission est confiée à l'archaïque boîte de vitesses Moss à première non synchronisée, l'overdrive Laycock de Normanville sur la quatrième étant proposé en option. Ce n'est qu'en 1965 qu'elle bénéficiera d'une transmission entièrement synchronisée. Privée de la direction à crémaillère de l'XK 140, la Mk 2 doit se contenter du boîtier Burman emprunté à la Mk VII. A l'avant, elle reçoit une suspension à roues indépendantes par triangles superposés, l'ensemble étant complété par une barre antiroulis. Elle conserve le traditionnel essieu arrière rigide, dont le robuste pont Salisbury est suspendu par des ressorts à lames semi-elliptiques du type cantilever, tandis qu'une barre Panhard et des tirants supérieurs en assurent le guidage. Equipée de quatre freins à disques Girling, la Mk 2 reçoit une voie arrière élargie afin de lui donner plus d'assise.
Les 240/340 et la fin d'une lignée prestigieuse
Best seller de la marque, la Mk 2 connaît un succès considérable, notamment aux Etats-Unis où elle est exportée en version 3,8 litres, essentiellement équipée de la boîte automatique. Pourtant, les ventes commencent à se tasser au milieu des années soixante, où la conception archaïque de son pont arrière commence à dater. D'autant qu'en version 3,8 litres, elle doublonne maintenant avec la Type S apparue en 1963 et équipée de l'essieu à roues indépendantes de la Type E. Elle sera retirée en septembre 1967, après que 83 980 exemplaires ont été construits, dont 30 141 en version 3,8 litres.
Les 240 et 340 prennent le relais de la Mk 2 en versions 2,4 litres et 3,4 litres. Subissant les outrages d'un traitement économique peu digne de Jaguar, ces deux berlines font un peu bon marché avec une sellerie en skaï qui, depuis septembre 1966 (sur la Mk 2), remplace le cuir Connoly. La plupart des exemplaires importés en France recevront cependant l'option cuir. Dans cette mésaventure, ces voitures perdent également leurs phares anti-brouillard, preuve d'une surprenante pingrerie. Par contre, elles gagnent les fins et élégants pare-chocs empruntés à la Type S, qui allègent leur silhouette. La 240 voit sa puissance passer à 133 ch grâce au montage de la culasse Straight Port. La 340 disparaîtra en septembre 1968, tandis que la 240 lui survivra jusqu'en avril 1969. Ainsi, la boucle est bouclée et c'est avec cette voiture que prend fin l'histoire d'une dynastie prestigieuse.
En près de quinze ans de carrière, la légendaire génération Mk1-Mk2 aura connu une production totale, tous modèles confondus et en incorporant la Daimler 2,5 litres, de 146 243 exemplaires, un nombre remarquable compte tenu du niveau de gamme de ces voitures et de leur prix.
La Mk 2 a joui, de son vivant, de la réputation de berline la plus rapide du monde. Une notoriété flatteuse accréditée par les nombreux succès glanés en compétition, aussi bien sur les circuits que dans les épreuves routières. A l'image des victoires remportées par Bernard Consten dans le Tour de France automobile. Cette réputation fait toutefois peu de cas des Américaines les plus performantes, qui, il est vrai, se situaient dans un autre créneau de prix. Car ce grand classique de l'automobile peut se prévaloir d'avoir offert, pour un coût abordable, un exceptionnel ensemble de qualités.
La Daimler V8 2,5 litres
C'est en novembre 1962, soit deux ans après le rachat de Daimler, que Jaguar place l'excellent V8 de la SP 250 dans la Mk 2. Ce V8 à soupapes en tête, alimenté par deux carburateurs SU, développe une puissance de 140 ch, qui offre à la Daimler 2,5 litres des performances supérieures à celles de la Mk 2 de 2,4 litres. Elle reçoit une sellerie et une finition qui lui sont propres, tandis qu'extérieurement, elle se reconnaît surtout à sa calandre spécifique. De forme identique à celle de la Mk 2, elle présente un contour plus épais dont la partie supérieure est guillochée, thème décoratif traditionnel à la marque. Les enjoliveurs de roue et l'éclairage de la plaque arrière d'immatriculation achèvent de la distinguer.
En recevant le même traitement que les 240 et 340, la Daimler 2,5 litres devient V8-250, aisément identifiable à ses fins pare-chocs. Malgré son V8, elle ne sera jamais exportée aux Etats-Unis, où la marque Daimler est inconnue. Dernière survivante de la lignée Mk 1/Mk 2 - elle ne sera retirée qu'en octobre 1969 -, elle est aussi la seule Jaguar à avoir jamais reçu un moteur Daimler.
L'âme et la musique du XK
En même temps qu'il émet le bruit caractéristique du démarreur des Jaguar, le bouton poussoir du contact libère la merveilleuse sonorité rauque du moteur XK (ici en version 3,8 litres), un régal pour le mélomane de la route. Elles accompagnent de puissantes accélérations, singulièrement sur le troisième rapport qui offre les envolées d'une mécanique toujours disponible et qui ne demande qu'à chanter. Avec un tel joyau, ce n'est pas un moteur qui se cache sous le capot, c'est une âme qui donne vie à la voiture. Pour autant, si elles échappent à la critique, les montées en régime n'apparaissent pas étourdissantes et au-delà de 4500 tr/mn, il faut insister pour amener le six cylindres à culminer mille tours plus haut, régime où l'habitacle est envahi par les décibels du moteur que l'on assimile alors vraiment à du bruit… C'est à partir de 3000 tr/mn, là où le couple de 33 mkg s'exprime dans sa plénitude, que les poussées rageuses du double arbre se manifestent avec la plus grande onctuosité. Bien réglé, le moteur supporte sans maugréer les reprises à 1500 tr/mn en quatrième, preuve d'une souplesse qui n'est plus à démontrer.
Il est de notoriété publique que les ingénieurs de Sa Majesté n'ont pas exprimé le meilleur de leur talent dans l'art des transmissions. Mais la boîte Moss apparaît de ce point de vue comme un sommet, vu l'incongruité de sa présence sur une voiture de cette qualité. Il faut donc aller chercher loin en avant la première non synchronisée et prendre garde de ne pas la confondre avec la marche arrière toute proche, dont le "clonk" perçu à l'enclenchement révèle la douloureuse tâche des engrenages. Accrocheuse, cette transmission archaïque impose le double débrayage pour rétrograder sur les hauts régimes, surtout en seconde, sous peine de faire hurler les synchros. De plus, sa lenteur, qui impose de lui laisser le temps de respirer au point mort, ne permet pas d'exploiter dans de bonnes conditions les remarquables ressources du moteur. Et ce d'autant que sa commande peu précise se voit pénalisée par de longs débattements. Par contre, l'overdrive, que l'on actionne par un levier placé sur la colonne direction, permet de soulager le moteur de l'ordre de 1000 tours en quatrième.
De puissantes mais lourdes berlines
Sur les petites routes, le poids de cette superbe " saloon " se fait lourdement sentir. Pour vaincre son inertie, il importe de la balancer énergiquement pour lui faire digérer les enchaînements de virages à la géométrie tourmentée. Dans cet exercice, le train arrière peu enclin à la discipline ne manque pas de nous gratifier de quelques figures sous l'effet du couple. Et sur les portions de chaussée dégradée passées à vive allure, l'essieu rigide se signale par de vifs écarts. Très démultipliée et manquant de précision, la direction ne favorise pas le contrôle du survirage, d'autant que le grand volant en bakélite oblige à jouer les moulins à vent - mouvements très pénalisants en conduite sportive. Non assistée sur la voiture de notre essai, cette direction se révèle également d'une grande dureté en manœuvres, lesquelles ne se trouvent guère améliorées pas le médiocre rayon de braquage.
Grande routière capable de moyennes élevées, la Mk 2 3,8 litres soutient sans broncher les 170 km/h dans le confort précieux et les effluves enivrants de ses cuirs. Vitesse à laquelle le moteur ne dépasse pas les 4500 tr/mn. Néanmoins, il convient de ne pas se méprendre. Très rapide et jouissant d'une mécanique à la générosité légendaire, la Mk 2 ne saurait être considérée comme un modèle réellement sportif. Son comportement routier ne s'y prête guère et, avec la transmission, il constitue sans doute le secteur où la voiture révèle son âge. Ceci ne saurait affecter sérieusement les formidables qualités qui étaient les siennes à son époque, et l'on ne saurait lui reprocher ce pourquoi elle n'a pas été conçue. Dieu merci, il y avait ce qu'il fallait dans la gamme Jaguar pour assouvir sa passion de la voiture de sport…
Nous avons également essayé une 340, qui, se trouvant être l'une des dernières fabriquées, a reçu une boîte de vitesses de XJ 6 de présérie. Quel plaisir de conduire une Mk 2 (ou assimilée) dotée d'une première synchronisée et d'une seconde non récalcitrante ! L'agrément s'en trouve considérablement amélioré et il devient alors possible de tirer la meilleure partie des ressources du moteur XK.
Le comportement routier de la voiture se trouve sensiblement amélioré par une direction assistée plus franche. La différence de puissance par rapport au 3,8 litres se révèle peu perceptible, et tout au plus peut-on ressentir une souplesse légèrement inférieure. Sensiblement modernisée, en particulier grâce à une transmission enfin digne de son moteur, cette dernière évolution de la génération Mk 1-Mk 2 offre un agrément de conduite en progrès qui s'accompagne d'une élévation du niveau des performances.
Choix du modèle, conseils d'utilisation, identification
Les amateurs de la génération des Jaguar Mk1 et Mk 2 - ils sont légion - se trouvent confrontés à un choix aussi vaste que cornélien, puisque pas moins de six modèles ont été commercialisés (en incluant la Daimler, il est vrai, peu connue en France). Le puriste passionné de l'esthétique des Jaguar anciennes optera pour la Mk 1, sous réserve d'en trouver une… Il pourra même aller jusqu'à choisir la version 2,4 litres pour ses "spats" (cache-roues arrière). Mais il doit savoir qu'il sacrifiera tout à l'esthétique, car les 112 ch du moteur s'avèrent nettement insuffisants pour les 1600 kilos de la voiture, laquelle plafonne à 160 km/h avec des accélérations léthargiques ! Cette motorisation est à éviter absolument sur la Mk 2, d'autant que la consommation pâtit lourdement de l'obligation de monter les régimes pour trouver les chevaux - elle s'établit à une moyenne proche de celle du moteur 3,8 litres.
Le collectionneur désirant concilier l'esthétique incomparable de cette lignée de voitures, un intérieur conforme à la grande tradition britannique et des performances dignes d'une berline moderne, optera pour la Mk 2. Le choix du moteur de 3,4 litres ou de 3,8 litres est plus une affaire de prestige, les performances et l'agrément de conduite se révèlant très voisins. La direction assistée apparaît comme une option recommandée (pour ne pas dire indispensable, surtout si Madame souhaite prendre le volant). Et si l'amateur ne prend pas sa Jaguar " saloon " pour une voiture de sport, la transmission automatique remplacera avantageusement la boîte Moss…
Pour autant, il ne faut jamais perdre de vue qu'une voiture de collection, même une Jaguar, ne saurait être considérée comme une automobile moderne. Le privilège de rouler en ancienne s'accompagne des inévitables caprices propres à ces modèles d'une autre époque, et un voyage peut parfois s'achever par la SNCF… Certes, le moteur XK jouit d'une solide réputation de robustesse. Ce n'est pas une raison pour lui faire subir un Paris-Marseille pied au plancher sur l'autoroute. Car il y a de fortes chances pour qu'il rende l'âme (bien) avant ! Du reste, un grand garage parisien, spécialiste de la marque de Coventry, excluait de la garantie de ses Jaguar vendues en occasion, les incidents mécaniques survenus sur autoroute…
Avant tout achat, il convient de vérifier le numéro de série de la voiture, qui est poinçonné sur la partie supérieure du radiateur, le suffixe DN indiquant la présence d'un overdrive. La plaque constructeur prend place dans le compartiment moteur, sur le passage de roue avant gauche (elle peut se trouver parfois au-dessus du relais de démarreur). Sur les exemplaires importés en France, la plaque des Etablissements Charles Delecroix est fixée sur le passage de roue avant droit. Pour vérifier si le moteur est bien celui d'origine, on trouvera son numéro estampé sur la culasse (à l'avant entre les deux cache-arbres à cames), ainsi que sur le côté droit du bloc, au niveau du pied de filtre à huile. La cylindrée est gravée dans la fonderie, sous les carburateurs. La concordance de ces numéros, ce que les anglophones appellent les " matching numbers ", confère une valeur supplémentaire à la voiture.
Carrosserie et habitacle
Il est aisé de se rendre compte si la couleur de la voiture correspond à celle d'origine en soulevant la banquette arrière pour dégager le tunnel de transmission, celui-ci n'étant que rarement repeint. Si tel est le cas, on poussera l'investigation jusqu'à inspecter la tôle située sous le pédalier, laquelle échappe presque toujours à la sollicitude du peintre… Par ailleurs, un choc avant mal réparé se détecte au mauvais alignement des longerons du faux châssis, particulièrement grâce à la gorge qui le borde et qui sera tordue en pareil cas.
La corrosion n'épargne pas la Mk 2, et il est fréquent que la traverse avant ait eu à en souffrir. Prise entre les fuites du radiateur situé au-dessus et les coups de crics qui la déforment par en dessous, elle subit les affres d'une situation difficile, d'autant que la terre s'emmagasine sur les retours qui tiennent les extrémités des ailes. Pour ce qui est de la carrosserie, les points les plus sensibles sont la petite tôle portant la veilleuse située sur les ailes avant, qui rouille autour de la soudure (à l'étain), ainsi que le retour des bas d'ailes.
Les bas de caisse apparaissent également très fragiles dans leur partie située juste derrière les roues - l'eau s'infiltrant par les passages de roues. La pluie pénètre aussi dans les portières qui sont équipées de lèche-vitres en feutre, et non en caoutchouc. Si les orifices d'évacuation prévus à cet effet dans le bas des portes sont bouchés, ce qui arrive fréquemment, celles-ci vont lentement se dégrader. Même remarque pour les supports de cric dans lesquels l'eau stagne si les bouchons de caoutchouc qui les obstruent ont disparu. A l'arrière, le bas du couvercle de malle est souvent corrodé par la faute d'une mauvaise évacuation de l'eau.
S'agissant de l'habitacle, la réfection de la sellerie vous coûtera entre 2300 € et 7600 €, selon la nature des matériaux utilisés. La réfection des boiseries pourra être confiée à un ébéniste français - il en existe d'excellents - pour un montant de l'ordre de 1800 €. Par ailleurs, les joints de portes présentent un profilé spécifique qu'il importe de respecter impérativement, sous peine de provoquer des fuites et d'intempestifs bruits aérodynamiques. Enfin, on se méfiera des jantes à rayons fabriquées en Inde, dont la forme du moyeu peut ne pas être conforme et dont la longévité du chromage paraît sujette à caution.
Mécanique
Sur le plan mécanique, la principale faiblesse de la Mk 2 tient à son circuit électrique réalisé en fils de coton. Le risque d'incendie n'est donc pas négligeable. De même, il arrive qu'au démarrage, le flotteur de l'un des carburateurs SU, coincé, ne remonte pas. L'essence déborde et passe alors par le tuyau de trop plein qui s'épanche sur le sol… Plus grave, cet incident peut se produire en roulant et, dans ces conditions, il n'est pas exclu que l'essence arrose l'échappement… Au volant d'une Jaguar, il convient de se montrer attentif à toutes les odeurs ! Un coupe-circuit et un extincteur de grande capacité apparaissent en conséquence comme des accessoires indispensables (comme du reste sur toutes les voitures anciennes).
On prendra soin de vérifier la concordance de la culasse avec le bloc, ces voitures ayant pu recevoir, dans leur période d'occasion, des pièces quelque peu fantaisistes. Si cela s'avère nécessaire, on peut avoir recours à un échange standard du moteur, mais on perd alors les " matching numbers " sans avoir la certitude de la qualité du travail réalisé. Il paraît plus judicieux de refaire la mécanique, toutes les pièces étant disponibles ou refabriquées. Le coût de l'ensemble des éléments nécessaires à la réfection complète du 3,8 litres XK se monte à 2300 €.
La pédale d'embrayage doit être haute, mais une défaillance constatée sur cet organe peut simplement tenir au flexible (à vérifier avant toute dépense plus conséquente). Sur la boîte de vitesses Moss, la première ne doit pas grogner, sous peine de révéler une détérioration des dents du train fixe (dans ce cas, la marche arrière participe également au sinistre concert). Sur une voiture fatiguée, on ne manquera pas de changer les "U" des attaches de pont (lequel par ailleurs ne doit pas siffler), ainsi que les silentblocs de la barre Panhard. Le train avant s'avère fragile en raison du poids du moteur et les silentblocs sont fréquemment usés, de même que les rotules.
Note au lecteur : ce guide ayant été publié le 27/03/2006, les prix indiqués pour les pièces et la côte des véhicules risquent de ne plus refléter l'état actuel du marché.