Acheter une AUDI RS4
Thomas Riaud le 15/04/2008
Héritière directe de la RS2, la RS4 fut lancée durant l'été 2000. Un été « chaud bouillant », puisque la RS4 développe 380 ch, ce qui en faisait le break sportif le plus performant du moment.
Historique
En à peine 30 ans, Audi s'est hissé au niveau de BMW et de Mercedes. Une prouesse rendue possible grâce, notamment, à la mythique Quattro Coupé GT, mise au point par un certain Ferdinand Piëch. Piëch est un génial homme de l'ombre qui a œuvré chez Porsche au plus haut point, directement sur la 911 d'abord, puis sur la formidable 917 qui a écrasé la concurrence en son temps aux 24 H du Mans. Cet homme clef s'en alla ensuite prendre la direction de la jeune marque Audi en 1975, déjà rattachée au puissant groupe Volkswagen.
La suite est auréolée de gloire, avec le fameux Coupé Quattro, qui s'imposera en rallye dans les années 80 entre les mains expertes de Michèle Mouton grâce à ses 4 roues motrices permanentes. Un système révolutionnaire à l'époque, qui fera école, au point d'équiper désormais bon nombre de sportives, comme la mégalo Bugatti Veyron voulue par… Piëch, et toutes les Audi à hautes performances, comme la récente R8 ou la RS4.
Cette héritière directe de la RS2 (315 ch), étroitement dérivée d'un ancien break Audi 80 (produite de 1994 à 1995 à 2000 exemplaires), fut lancée durant l'été 2000. Un été « chaud bouillant », puisque la RS4, dérivée elle du break A4 (Avant) de première génération, développe 380 ch à 6100 tr/mn. Une puissance comparable pour l'époque à la Ferrari 360 Modena (400 ch), ce qui faisait de la RS4 le break sportif le plus performant du moment.
Développée en étroite collaboration avec Porsche pour le châssis et les trains roulants (dont les freins ventilés), la RS4 tire cette redoutable écurie d'un V6 2.7 biturbo souple à bas-régime, et plein de hargne « dans les tours ». Un moteur de feu, mis au point cette fois dans les ateliers de Cosworth. Seul bémol : ce break est limité électroniquement (comme toutes les allemandes, sauf les Porsche), à 250 km/h ce qui, vous l'admettrez, est un peu ridicule…. voir hypocrite pour une super-sportive ! Mais la RS4, bien que discrète en apparence, est tout sauf ridicule.
Par rapport à un break A4 « de base » (qui reste la seule carrosserie disponible), cette version survitaminée se reconnaît au premier coup d'œil grâce à ses rétroviseurs en aluminium brossé, mais aussi ses boucliers spécifiques avec ses entrées d'air majorées, ses généreuses jantes en alliage de 18' qui effleurent des passages de roue sensiblement élargis, sans oublier la double sortie d'échappement.
Ce « tuning » haute couture avant l'heure se retrouve bien évidemment à l'intérieur. Comme à l'accoutumée chez Audi, la finition frise le sans-faute, avec une sélection de matériaux de qualité (carbone, plastiques moussés), parfaitement assemblés et ajustés. Les sièges baquets Recaro tout habillés de cuir, disposent d'une assise pouvant s'allonger afin de trouver une position de conduite parfaite. Le « copilote » sera également séduit par la richesse de l'équipement de série et la présentation intérieure qui, bien qu'austère, séduit par sa sobriété.
En revanche, ce break de seulement 4m53 a la fibre familiale limitée, avec des places arrière assez étriquées et un volume de coffre compté (390 litres), plus pratique que sur la berline, mais pas vraiment plus spacieux. Comprenez par là que la RS4 ne sait jouer les déménageurs… que face à un chrono. De ce point de vue les amateurs de performances seront comblés, avec un 0 à 100 km/h d'abattu en à peine 4,9 secondes ! En revanche, ceux qui recherchent des sensations fortes seront sans doute un peu déçus. Certes, la RS4 pousse (très) fort, mais le biturbo délivre sa puissance de manière linéaire, en oubliant tout « coup de pied aux fesses ».
En outre, avec sa transmission intégrale permanente, cette Audi se montre plus efficace que réellement joueuse. Scotchée au bitume, même sur un sol « gras-mouillé », l'auto vire quasiment à plat dans les courbes en restant, comme sur des rails, inscrite sur sa trajectoire. Diablement rassurant mais… frustrant ! Même à très vive allure, la RS4 gomme toute sensation, ce qui est un peu décevant sur une auto à tempérament sportif. Mais cet « outil » a ses adeptes (et on le comprend !), en particulier tous ceux qui vivent dans une région au climat parfois rude où les routes sont de surcroît sinueuses et piégeuses.
La confidentielle Audi RS4 s'est retirée du devant de la scène début 2002, pour ne pas faire d'ombre à la nouvelle A4. Mais ce cocktail séduisant entre break et sportivité a fait école, puisqu'il se trouve reconduit sur la toute dernière génération d'A4, encore plus puissante (420 ch) et toujours autant polyvalente. Et pour ceux qui adhèrent au concept mais qui voudraient bénéficier d'un peu plus de place, sachez qu'Audi a pensé à eux avec la formidable RS6 !
Identification
La plaque constructeur, sur laquelle est inscrit le numéro de châssis (que l'on doit impérativement retrouver sur la carte grise), est située dans le compartiment moteur sur une plaque fixée à gauche, dans le compartiment moteur (en étant face à l'auto).
Ce même numéro est gravé dans le tablier (cloison en acier), qui sépare le compartiment moteur de l'habitacle. Sinon, s'il n' a pas eu d'évolution de style sur la courte carrière de la RS4, sachez que cette génération se reconnaît immédiatement à son traitement spécifique, sobre mais sportif (uniquement en carrosserie break Avant).
Elle adopte notamment des boucliers spécifiques (avec prises d'air majorées à l'avant), des rétros extérieurs en aluminium brossé, et une double sortie d'échappement chromée. L'intérieur est du même tonneau, avec des seuils de portes frappés du sigle RS4 (que l'on retrouve sur le volant), et des sièges Recaro en cuir, reprenant cette appellation.
Bien sûr, les compteurs sont spécifiques à cette version, avec un tachymètre de vitesse gradué jusqu'à 300 km/h. Enfin, le carbone est omniprésent (sur la culasse du moteur, mais aussi sur le tableau de bord et même les contre-portes).
Structure, châssis et carrosserie
L'Audi RS4 partage de nombreux éléments avec la carrosserie de l'A4 « normale », dont sa coque en acier. Pour gagner quelques kilos, la belle adopte quelques pièces en aluminium (rétros extérieurs, renforts derrière le bouclier avant et dans les portières…), ce qui lui permet d'afficher sur la balance 1620 kg. Pas mal du tout pour un break à transmission intégrale richement doté et bardé d'équipements électroniques en tout genre (ESP, antipatinage…).
A noter : par rapport à une A4 cabriolet, l'Audi RS4 ne reçoit pas, contrairement aux idées reçues, de barre anti-rapprochement dans le compartiment moteur, pour gagner en rigidité (elle l'est déjà suffisamment !). En revanche, l'auto adopte un châssis sport, permettant d'abaisser le centre de gravité et donc d'optimiser la tenue de route.
Moteur
C'est le cœur de l'Audi RS4, et c'est ce qui en fait toute l'originalité. Le bloc, couplé exclusivement à une excellente boite mécanique à 6 rapports, est un « modeste » V6 2.7. Mais grâce au savoir-faire de Cosworth, son préparateur, il se trouve gavé par deux turbos. Du coup, il délivre un couple appréciable sur une longue plage d'utilisation (400 Nm de 2500 à 6000 tr/mn), et une puissance de feu redoutable (380 ch de 6100 à 7000 tr/mn), susceptible d'inquiéter une Porsche 911.
Ce bloc coiffé de carbone s'avère fiable, sous réserve d'être correctement utilisé. En effet, ceux qui ont pour fâcheuse habitude de couper le contact brutalement après un long parcours à haute vitesse peuvent endommager les turbos. Mais quelques éléments périphériques à ce moteur (équipé d'une distribution par courroie, à changer tous les 70 000 km) vieillissent moins bien, et peuvent entraîner des avaries.
Ainsi, les collecteurs des turbos sont dotés de bagues qui pouvaient vibrer. A force, ces derniers cognaient sur les turbos, au point de provoquer une panne (phénomène connu aussi sur les S4). Enfin, l'admission d'air des turbos, en « Y », peut se fendre par en-dessous (difficilement visible), ce qui provoque une prise d'air, et dérègle la gestion électronique du moteur, au point là encore de provoquer un dysfonctionnement (perte de puissance).
Suspensions et trains roulants
A l'instar de la S4, l'Audi RS4 reçoit d'office un châssis sport. Ainsi, les mouvements de caisse mal maîtrisés, propres à cette génération d'A4, ne sont ici plus qu'un lointain souvenir (suspensions trop souples en détente). Revers de la médaille : la fermeté excessive de ce châssis (et des amortisseurs spécifiques montés en conséquence), se paye un peu au détriment du confort, dès que l'on passe sur un joint de dilatation par exemple (réactions sèches).
Toujours de série, l'Audi RS4 adopte de grosses jantes en alliage de 18', avec des pneus en rapport (255/35 ZR 18), ce qui là encore favorise le comportement routier, mais pénalise le confort. Aussi, grâce à la transmission intégrale Quattro (avec différentiel Torsen à glissement limité), on repousse considérablement les lois de la physique (« grip » accru lors des phases d'appui), ce qui use prématurément les pneus, en cas de conduite sportive bien sûr.
Les jantes étant très exposées aux coups de trottoir, vérifiez bien l'état des flancs avant d'acheter.
Freinage, direction et pneus
L'Audi RS4 reçoit 4 disques ventilés signés Brembo, ce qui lui assure un freinage puissant et endurant, difficile à prendre en défaut. Néanmoins, quelques cas de disques voilés sont connus (en utilisation vraiment intensive, et répétée). Un échauffement qui peut aussi concerner le liquide de frein qui risque… de bouillir (à changer régulièrement, donc !).
Mais le vrai problème reste des cas répétés de voilages des jantes. Pour y remédier, un rappel a été effectué par Audi. Donc avant d'acheter, renseignez-vous bien auprès de votre vendeur sur ce sujet (et essayez l'auto !).
La direction, naturellement assistée (et réglable en hauteur), brille par sa précision, permettant de placer au centimètre la voiture sur les points de corde, ce qui participe beaucoup au plaisir de conduite.
Quant aux pneumatiques, il s'agit de 255/35 ZR 18, soumis à de très fortes contraintes à cause du grip phénoménal procuré par la transmission intégrale Quattro. Ainsi, ces derniers peuvent, en utilisation sportive, ne pas dépasser les 20 000 km en longévité !
Habitacle et finitions
C'est un autre point fort de la RS4. Comme sur la plupart des Audi, la RS4 bénéficie d'une rigueur « à l'allemande » de bon alois, tant au niveau des matériaux sélectionnés, généralement riches, que par la qualité des assemblages. Cela garanti une bonne tenue dans le temps, et supprime tout bruit parasite de « mobilier ».
Vous noterez la présence massive du carbone à bord (tableau de bord, console centrale, contre-portes), matériaux léger et sportif, collant à merveille à l'esprit de l'auto.
L'Audi RS4 étant le très haut de gamme de l'époque, elle a le droit à un équipement de série pléthorique (4 airbags, clim automatique, radio-CD, rétros et vitres électriques, verrouillage centralisé à distance, alarme, antibrouillards, phares bi-xénon…) et à un traitement particulier, comme l'adoption de sièges baquet en cuir signés Recaro, de jantes en alliage spécifiques de 18' ou encore de boucliers « sur-mesure », avec des prises d'air majorées.
Du « tuning » avant l'heure… très haute-couture !
Prise en main
Mis à part l'ambiance « course » procurée par les sièges très enveloppants, offrant un maintien latéral parfait, on se croirait à bord d'un break Avant de grande série. Mais un bref coup d'œil sur les compteurs trahit le vrai caractère de cette auto : vous êtes bien assis dans une authentique sportive.
Pour ceux qui en douteraient, il suffit de lancer le moteur. Le son rauque et métallique n'a en effet rien à voir avec le bruit « agricole » d'un TDI ! Les accélérations distillées non plus d'ailleurs… Une fois que le V6 2.7 biturbo est à température, une franche pression sur la pédale de droite vous catapulte avec conviction dans l'horizon.
La poussée, franche et linéaire, vous plaque avec bonheur au fond des baquets (0 à 100 km/h en 4,9'), et sur une autoroute allemande, vous aurez tôt fait de filer à plus de 250 km/h compteur (vitesse bloquée électroniquement), à fond de sixième. A vrai dire, sans cette bride, il y a fort à parier que la RS4 puisse atteindre sans problème les 280 km/h !
Pourtant, en dépit de ces valeurs proches d'une Porsche 911 l'Audi RS4, assez confortable et bien insonorisée, ne donne jamais l'impression de rouler vite. Un vrai piège à permis ! C'est d'ailleurs là le plus gros défaut que les amateurs de sensations fortes pourront lui trouver. L'efficacité de la transmission intégrale Quattro (« grip » parfait), associée à la précision de la direction sont tels que l'auto pardonne tout ou presque, au risque de vraiment frustrer le conducteur.
Même à vive allure, les courbes et les virages ne sont qu'une simple formalité. Et s'il vous vient à l'esprit de déconnecter l'ESP, il ne se passe pas non plus grand chose, si ce n'est que l'auto affiche cette-fois un comportement légèrement sous-vireur, très rassurant. Pour faire décrocher le train arrière, il n'y a qu'un seul remède, vraiment peu académique : tirer sur le frein à main !
A propos de freinage, ce dernier séduit par son mordant, mais il manque franchement d'endurance en conduite vraiment sportive. Finalement, ce concentré d'efficacité absolu fera sans doute fuir les plus sportifs d'entre nous, qui recherchent avant tout leur lot de sensations fortes, avec un feeling de conduite bien moins aseptisé.
En revanche, ceux qui veulent rouler « fort », en famille et en toute sécurité, sans trop se soucier des conditions météorologiques, seront forcément comblés par la redoutable Audi RS4. A vous de juger !
Budget d'entretien et côte
En dépit des apparences, l'Audi RS4 n'a pas grand chose en commun avec l'A4 TDI de votre voisin. Il en va de même des coûts d'entretien, en rapport avec le niveau de performance de cette voiture : élevé ! Positionnée haut de gamme à l'époque (463 000 F au catalogue !), la RS4 a certes largement décotée depuis, mais ses coûts d'utilisation demeurent invariablement chers.
Outre une consommation mixte largement supérieure à 13 l/100 km, ce break a une fâcheuse tendance à user rapidement tous les « périssables », comme les pneus ou les freins. Pour information, les pneus sont à remplacer en moyenne tous les 40 000 km (voir moins en cas de conduite sportive). Pour les 4 pneus (de marque Continental, comme à l'origine), comptez 1500 €.
Le freinage (disques ventilés) est quant à lui à changer tous les 90 000 km, en même temps que les amortisseurs. Pour ces-derniers, comptez 1700 € pour ceux situés à l'arrière, pose comprise. Aussi, sachez que tous les 70 000 km, une grosse révision est à effectuer, avec le changement de la pompe à eau, mais surtout la pose d'une nouvelle courroie de distribution. Cette intervention, indispensable, coûte au bas mot 2400 € (vérifiez bien ce paramètre avant d'acheter !). Pour un kilométrage moyen de 15 000 km par an, prévoyez ainsi une enveloppe d'environ 2500 € (hors carburant et assurance).
Enfin, un bel exemplaire de mai 2001 se négocie 30 000 € (pour 75 000 km), voire 23 000 € pour un exemplaire approchant les 160 000km. Le prix à payer pour vivre le sport automobile en famille !
Merci à Mr Augusto, propriétaire du superbe exemplaire qui illustre ce dossier, qui est par ailleurs à vendre. Contactez-le au 06 08 76 61 90.
Note au lecteur : ce guide ayant été publié le 15/04/2008, les prix indiqués pour les pièces et la côte des véhicules risquent de ne plus refléter l'état actuel du marché.