Saga Rolls-Royce
Le célèbre slogan « Best car in the world » reflète l’exigence du créateur de la marque. Tout au long de sa brillante carrière, Henry Royce fera preuve d’une compétence à la hauteur de son angoisse de perfection.
sommaire :
ROLLS ROYCE Silver Shadow
Gilles Bonnafous le 15/07/2008
Avec la Silver Shadow, Rolls-Royce est sorti des écuries royales. En abandonnant l'aristocratique et très britannique forme de la Silver Cloud, la marque a perdu de sa superbe. Après un temps de gestation pachidermique — dix ans de conception et de mise au point —, cette voiture inaugure, en octobre 1965, une ère nouvelle pour la marque. Elle en battra du reste tous les records de production au cours d'une carrière longue de quinze ans.
Plus qu'une étape, la Silver Shadow représente pour le constructeur de Crewe une rupture historique et un véritable aggiornamento technique. Abandonnant le châssis séparé, la voiture se présente comme la première monocoque autoportante de la marque. Tout comme elle est la première Rolls-Royce équipée de quatre roues indépendantes. La nouvelle suspension arrière se voit épaulée par un correcteur d'assiette hydraulique, qui utilise le brevet Citroën.
Silver Shadow I D.R. / Rolls-Royce
Silver Shadow I D.R. / Rolls-Royce
Mais ce qui apparaît comme une révolution chez Rolls-Royce ne représente qu'une tardive actualisation. Car ce recours à des solutions techniques modernes a été depuis longtemps consacré par tous les constructeurs : la structure monocoque par Vauxhall en 1937 et par Ford Dagenham en 1950. Crewe apparaît bien comme une citadelle du conservatisme.
Avec sa silhouette abaissée et anguleuse, la Silver Shadow consacre également le passage de Rolls-Royce à la ligne ponton. Certes, on parlera de banalisation et l'on objectera que la voiture perd sa spécificité britannique. Il n'empêche, la forme très homogène est emprunte d'une noble élégance et le profil révèle un remarquable équilibre des proportions.
Silver Shadow I D.R. / Rolls-Royce
Silver Shadow I D.R. / Rolls-Royce
Son gabarit réduit fait de la Silver Shadow la plus petite des Rolls-Royce avec une longueur de 5,17 mètres. Surtout elle perd dix centimètres en largeur par rapport à sa devancière. Moins spacieuse, elle prend ainsi les traits d'une simple berline quatre places. Nous sommes loin du carrosse royal… Cette révolution "démocratique" est révélatrice de notre époque. La majorité des Silver Shadow seront désormais conduites non par un chauffeur mais par leur propriétaire… devenu "owner driver".
Première Rolls-Royce à recevoir des freins à disques, la Silver Shadow en est dotée sur les quatre roues. Son système de freinage apparaît du reste comme un modèle de sophistication, avec un triple circuit assisté. Autre nouveauté, une direction assistée et équipée d'un amortisseur est livrée en série.
Silver Shadow I D.R. / Rolls-Royce
Silver Shadow I D.R. / Rolls-Royce
Le V8 de 6,2 litres est identique à celui de la Silver Cloud III. Les voitures destinées au marché intérieur reçoivent la transmission GM Hydramatic à quatre vitesses, tandis que celles construites pour l'exportation, donc à conduite à gauche, bénéficient de la nouvelle Hydramatic Turbo à trois rapports — elle équipera tous les modèles à partir de 1968. Modifié en 1970, le moteur voit sa cylindrée passer à 6750 cm3.
Le passage à la carrosserie autoportante a donné le coup de grâce aux carrossiers. Park Ward et H. J. Mulliner sont repris par Rolls-Royce, avec pour conséquence une certaine standardisation de la production, également nouvelle pour la marque. Ils réaliseront en 1966 un très élégant coupé. Seul demeure James Young, qui transforme en coupé une cinquantaine de berlines fournies par l'usine. Une version à châssis long fait son apparition en 1969.
Silver Shadow II D.R. / Rolls-Royce
Silver Shadow coupé Gilles Bonnafous
Pour faire face à la concurrence et en attendant la sortie d'un nouveau modèle, la Silver Shadow subit un lifting en 1977. Présentée au Salon de Genève, cette Silver Shadow II reçoit, sous une carrosserie identique, un certain nombre d'améliorations mécaniques, comme (enfin) une direction à crémaillère. Elle est identifiable à la forme modifiée des pare-chocs et à la présence d'un bouclier, qui réduit la hauteur de la calandre. La version longue de la Silver Shadow II devient Silver Wraith II, une appellation qui la distingue du modèle normal.
C'est sous cette forme que prend fin, en 1980, la carrière du modèle, qui a conforté sa position sur le marché américain et, signe des temps, a connu une forte expansion au Moyen-Orient.
Silver Shadow II D.R. / Rolls-Royce
Silver Wraith II D.R. / Rolls-Royce