Saga Rolls-Royce
Le célèbre slogan « Best car in the world » reflète l’exigence du créateur de la marque. Tout au long de sa brillante carrière, Henry Royce fera preuve d’une compétence à la hauteur de son angoisse de perfection.
sommaire :
ROLLS ROYCE Silver Cloud
Gilles Bonnafous le 15/07/2008
D’une grande élégance, ses lignes fluides font de la Silver Cloud la plus belle de toutes les Rolls-Royce à carrosserie usine. Malgré des proportions imposantes, aucune lourdeur. Que de la majesté et de la distinction. Les créations spéciales des carrossiers n’égaleront que rarement la parfaite réussite de la voiture d’usine.
La Silver Cloud succède à la Silver Dawn en 1955. Elle est toujours construite sur un châssis séparé, une technique archaïque qui permet toutefois aux clients qui le souhaitent de faire réaliser la carrosserie par une grande maison, à l’image de James Young, Hooper ou Mulliner. Mais dans leur grande majorité, les Silver Cloud seront dotées d’une carrosserie usine. Deux versions d’empattement sont disponibles, 3,12 mètres et 3,22 mètres.
Silver Cloud I D.R. / Rolls-Royce
Silver Cloud II cabriolet Mulliner D.R. / Rolls-Royce
Le moteur dérive de celui de la Silver Wraith, un six cylindres en ligne à soupapes opposées — en tête à l’admission, latérales à l’échappement. D’origine fort ancienne, ce 4,9 litres bénéficie sur la Cloud d’une nouvelle culasse en alliage léger. Deux carburateurs SU remplacent l’unique carburateur des Wraith et Dawn. La voiture atteint ainsi les 160 km/h et court le 0 à 100 km/h en 13 secondes, un chiffre flatteur pour une limousine de grand luxe de l’époque. Le tout dans un silence de cathédrale. Construite sous licence par Rolls-Royce, la transmission automatique General Motors Hydramatic à quatre vitesses est désormais montée en série. Le reste relève de la dotation traditionnelle avec une suspension arrière à pont rigide (ressorts à lames) et quatre freins à tambours.
S’il a beaucoup évolué au fil des décennies, le six cylindres Rolls-Royce en fonte arrive en bout de développement — sa conception remonte à 1922 avec le lancement de la Twenty. La Silver Cloud I sera la dernière six cylindres de Crewe. Le modèle connaît en 1959 sa première évolution en recevant un tout nouveau groupe. Ainsi naît la Silver Cloud II, qui consacre le passage de Rolls-Royce au V8. Un aggiornamento dicté par le marché d’outre-Atlantique, qui constitue le principal débouché commercial de la marque avec le Royaume-Uni. D’ailleurs l’avant-projet du moteur a été réalisé par la General Motors.
Silver Cloud II châssis long D.R. / Rolls-Royce
Silver Cloud III D.R. / Rolls-Royce
L’imposant V8 de 6,2 litres à course courte et vilebrequin monté sur cinq paliers est réalisé en aluminium, bloc et culasses (interchangeables). Il est également équipé de poussoirs de soupapes hydrauliques. On évalue sa puissance à une valeur proche de 200 ch à 4500 tr/mn. Malgré ses 1820 kilos, la vitesse approche les 180 km/h. En conduite soutenue, la consommation flirte avec les trente litres aux cent kilomètres…
Si les freins sont toujours à tambours (!), la direction reçoit une assistance en série. Nouveauté, la caisse est montée sur des silentblocs qui l’isolent du châssis. Ceci a pour effet d’améliorer encore le silence proverbial de la Rolls. De l’extérieur, la voiture est strictement identique à sa devancière. Par contre, l’habitacle est gratifié d’un tableau de bord entièrement nouveau, dont les instruments sont groupés derrière le volant (au centre de la planche de bord sur la Silver Dawn).
Est-ce pour contrer la concurrence de la Mercedes 600 annoncée pour l’année suivante que Rolls-Royce présente à la fin de 1962 la Silver Cloud III ? Techniquement, l’allemande va se révéler très supérieure : freins à disques, suspension à quatre roues indépendantes avec amortisseurs pneumatiques, moteur à injection. Pourtant, la voiture de Stuttgart ne parviendra jamais à inquiéter commercialement la Silver Cloud, pas plus que la Silver Shadow.
Silver Cloud III Gilles Bonnafous
Silver Cloud III Gilles Bonnafous
Quoi de neuf sur la Silver Cloud III ? Quelques perfectionnements qui concernent le moteur légèrement plus puissant, un système de freinage à deux circuits et une face avant qui cède à la mode des quatre phares. Ceux-ci sont, avec la disparition des feux de position sur les ailes avant, le seul élément extérieur d’identification de la voiture. La transmission est confiée à la version à trois rapports de l’Hydramatic General Motors.
Outre la berline, la Silver Cloud a, au cours de ses dix ans d’existence, reçu quelques carrosseries de coupés et de cabriolets — Mulliner a ainsi réalisé 107 cabriolets sur la Cloud II. Quant aux versions longues, elles ont surtout été carrossées par James Young. Ce sont des limousines d’apparat destinées à de riches personnalités ou à des têtes couronnées, à l’image de celle commandée au concessionnaire parisien par le roi Hassan II du Maroc (une version à deux portes).
Dernière Rolls-Royce à châssis séparé, la Silver Cloud s’efface au profit de la Silver Shadow lancée en 1965. Au cours de sa brillante carrière, elle a battu, avec près de 7500 exemplaires construits, tous les records de production de la firme. Elle est aujourd’hui « la » Rolls-Royce aux yeux des collectionneurs.
Silver Cloud III Cabriolet Park Ward D.R. / Rolls-Royce