Saga Facel Vega
Le lancement en 1954 de la marque Facel Véga apparait comme un défi à la raison. Jean Daninos rêve de doter la France d’une automobile sportive de prestige. C’est peu dire que le contexte se prête mal à une telle initiative.
sommaire :
FACEL VEGA Facellia et ses évolutions
Gilles Bonnafous le 26/01/2004
Vu leur prix de vente et leur niveau de consommation élevé, les grosses Facel V8 s’adressent pour l’essentiel aux clients étrangers. Souhaitant élargir sa gamme vers le bas afin de toucher la clientèle française, Jean Daninos décide de proposer une petite Facel, la Facellia, dont la mission sera de concurrencer les Alfa Romeo, Porsche 356 et autres cabriolets anglais (MGA, Triumph).
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Toutefois, l’affaire s’engage assez mal, Facel se voyant refuser par les Pouvoirs publics l'autorisation d'importer un moteur étranger. Jean Daninos s’adresse alors à Pont-à-Mousson, qui fournit depuis plusieurs années les boîtes de vitesses des coupés V8 et de l’Excellence. En effet, Pont-à-Mousson possède dans ses cartons l’étude d’un six cylindres à double arbre à cames en tête. La mécanique de la Facellia en sera extrapolée pour donner un quatre cylindres en ligne de 1646 cm3. Développant 115 ch à 6400 tr/mn, ce dernier permet à la voiture d’atteindre les 180 km/h. La boîte de vitesses à quatre rapports synchronisés provient également des fonderies de Pont-à-Mousson.
La Facellia est révélée au grand public lors du salon de Paris de 1959. Sa structure reprend les solutions éprouvées par la marque : châssis à longerons tubulaires, suspension avant indépendante et essieu arrière rigide, direction à vis et galet. Le freinage est assuré par quatre disques (en option sur les premières voitures). Esthétiquement, la Facellia demeure fidèle à l’élégance sobre et raffinée qui signe les Facel, de même qu’à la finition élaborée qui caractérise tous les modèles de la marque. Sa ligne classique, qui reprend le style de la HK 500 adapté au gabarit européen, offre un remarquable équilibre visuel.
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La Facellia séduit la clientèle à laquelle elle s’adresse et plus de mille commandes sont enregistrées au début de l’année 1960. Hélas, les acquéreurs vont vite déchanter. Par la faute d’une mise au point bâclée, la mécanique Pont-à-Mousson va s’attirer une sinistre réputation. Système de refroidissement insuffisant, chemises humides déficientes entraînant une surconsommation d’huile, distribution délicate : les chambres de combustion connaissent des coups de chalumeau qui percent les pistons et la longévité du quatre cylindres dépasse rarement le cap des 3000 kilomètres ! Les moteurs sont alors pris en charge au titre de la garantie et ces opérations vont coûter cher à Facel. En 1961, la trésorerie de l’entreprise sera engloutie par le remplacement des moteurs de la Facellia.
Coupé 4 places (prototype) 1960 D.R
Facellia hard-top 1960 D.R
Dans un premier temps, la voiture n’existe qu’en cabriolet. Mais dès le mois de mai 1960, elle est déclinée en coupé deux places, puis à quatre places au salon de Genève 1961. C’est également en mars de la même année qu’apparaît une nouvelle version, la Facellia F2, équipée d'un moteur renforcé. Le salon de Genève sert également de cadre au lancement d’une variante plus performante, la Facellia F2 S, dont les deux carburateurs Weber double corps portent la puissance à 126 ch. La voiture est chronométrée en essai à près de 193 km/h.
Facellia F2 coupé 2 places D.R
Facellia F2 coupé 4 places D.R
Malgré ces améliorations et une victoire de classe remportée au rallye de Monte-Carlo 1961 (Gatsonides et Van Noordwijk en catégorie 1,6 à 2 litres), la réputation de la Facellia est faite et la F2 ne parvient pas à convaincre. En 1961, les nouveaux patrons de Facel, nommés suite aux graves problèmes de trésorerie que connaît l’entreprise, confient le moteur Pont-à-Mousson au préparateur Le Moteur Moderne. A charge pour cette maison d’en accroître à la fois la fiabilité et les performances. Exposée au salon de Paris 1961, la F2 revendique 120 ch et la F2S 131 ch. Cette nouvelle évolution de la Facellia est aisément identifiable à ses nouveaux yeux, des doubles phares logés sous un globe (les optiques Mégalux de Marchal), ainsi qu’à son tableau de bord qui bénéficie du revêtement imitant le bois précieux comme sur les Facel V8.
Habitacle de Facellia F2 D.R
Moteur de la Facellia F2 S D.R
Pour tenter de redresser la barre, Facel s’adresse à Volvo pour la fourniture du quatre cylindres équipant le coupé P 1800 S. Réputé pour sa fiabilité, ce moteur de 1780 cm3 développe 108 ch. Il est accouplé à la boîte de vitesses du constructeur suédois, qui reçoit un overdrive en option. Présentée en avril 1963, la Facel III subit un léger remodelage esthétique — la calandre est modifiée et le coffre arrière arrondi. Mais, pas plus que le lancement de la F2, le recours au moteur Volvo ne changera rien, le mal est fait et la Facel III arrive trop tard. Elle ne vivra que l’espace d’une année (619 exemplaires produits).
Parallèlement, et malgré la situation très précaire dans laquelle se débat l’entreprise, Jean Daninos a négocié un accord avec Leonard Lord, le patron de la BMC, pour obtenir une mécanique plus puissante et plus noble, un six cylindres, celui de l'Austin-Healey 3000 Mk 2. Ce groupe motorise la nouvelle Facel VI présentée à la presse le 20 mai 1964. Réduit à 2852 cm3 pour des raisons fiscales, il développe 150 ch à 5250 tr/mn et la voiture frise les 195 km/h. Reconnaissable à ses roues à rayons Borrani ou Dunlop, la dernière Facellia ne sera construite que pendant quelques mois et sa production ne dépassera pas les 32 exemplaires.
Facel III D.R
Facel IV D.R