Mercedes-Benz Heritage
Mercedes-Benz met son ambitieuse politique patrimoniale au service de ses nouveaux modèles. Musée flamboyant, Classic Center élitiste, réserves richissimes : voyage au cœur du sanctuaire de Stuttgart.
sommaire :
Le Classic Center
Gilles Bonnafous le 23/08/2007
Situé au cœur du dispositif de Mercedes-Benz Heritage, le Classic Center en est à la fois la vitrine commerciale et l’outil technique. Ouvert depuis 1993, il est dédié aux modèles des marques Daimler, Benz, Mercedes et Mercedes-Benz d’au moins vingt ans d’âge — alors qu’en Allemagne, une voiture n’est juridiquement considérée comme véhicule de collection qu’à partir de trente ans. Les Maybach ne sont pas concernées.
65 personnes, dont 21 mécaniciens, travaillent au Classic Center, qui, contrairement au musée, est organisé en centre de profit. Il est doté d’un show-room de 750 m2, qui présente une dizaine de voitures à vendre, surtout des 300 SL et 190 SL, ainsi que des cabriolets (300, 280 SE, etc.). Tout sont restaurées à la perfection.
Vue générale de l'atelier avec un cabriolet Bracq Gilles Bonnafous
Vue exterieur du classic center Gilles Bonnafous
Le Classic Center assume deux fonctions principales : fourniture de pièces détachées et restauration. La mise à disposition de pièces détachées constitue l’une des plus importantes activités du Centre, qui reçoit chaque année 30 000 demandes. Il dispose d’un stock de 40 000 références correspondant à plus de vingt séries de modèles.
Si certaines viennent à manquer, elles sont refabriquées — c’est le cas de 4000 pièces chaque année. Le travail est confié à des fournisseurs, qui ont été sélectionnés par Mercedes pour la qualité de leur travail. Ils sont au nombre de 150. Toutes les pièces bénéficient de la garantie de la marque. Il convient de signaler que Mercedes-Benz prépare l’avenir et planifie le volume des pièces détachées, dont le Classic Center aura besoin pour les futures voitures de collection, comme les SL.
Le showroom Gilles Bonnafous
Une réplique du tricycle de Karl Benz... Dans les bureaux ! Gilles Bonnafous
Chaque année, 900 voitures passent par l’atelier de restauration du Classic Center. Son activité concerne aussi bien les véhicules de la collection Mercedes que celles des clients. Elle inclut des travaux légers (certains clients particulièrement exigeants viennent régulièrement faire entretenir leur voiture) comme des restaurations lourdes, qui peuvent durer plusieurs années. Les modèles sur lesquels sont pratiquées le plus grand nombre d’interventions sont la 300 SL, la 300, la 600 et les avant-guerre.
On l’aura compris, l’atelier œuvre surtout sur les modèles d’exception et il restaure avant tout les voitures d’avant guerre, dont il est le spécialiste. Il marie le savoir-faire traditionnel aux techniques les plus récentes. Pour les travaux de carrosserie les plus complexes, il peut avoir recours au Centre de Recherches d’Ulm, comme ce fut le cas de la W 196 carénée châssis n°10. La collection Mercedes (musée et réserves) occupe la moitié du plan de travail de l’atelier. Ainsi, les voitures alignées dans les grandes manifestations d’automobiles de collection (Mille Milles, Goodwood, Pebble Beach, etc.) sont préparées au centre et vérifiées à leur retour.
540 K à l'entretien Gilles Bonnafous
300 SL à l'entretien Gilles Bonnafous
Si un client souhaite confier à l’atelier la restauration d’une rare voiture des années vingt par exemple, le Classic Center vérifie d’abord les numéros de châssis et de moteur dans les archives. Après quoi, il réalise une expertise en fonction de l’état de la voiture et établit un devis de restauration. Il utilisera ensuite les plans de l’époque pour la restaurer dans la stricte conformité de l’origine. Le Classic Center est légitimement très sourcilleux sur cette question — pas question de faire de la fantaisie !
Au cours de nos visites, nous avons observé d’importants chantiers en cours pour des collectionneurs privés. Notamment un cabriolet 770 Grosser Mercedes (Grande Mercedes) appartenant au roi de Jordanie, ainsi qu’une Daimler de Grand Prix de 1906, dont trois exemplaires seulement sont recensés — l’un fait partie de la collection Mercedes. La voiture ne possédant pas de moteur, ce dernier a été reconstruit d’après les plans de l’époque conservés dans les archives. Deux 600, dont l’une pour un client des Emirats, étaient également aux mains de l’équipe spécialiste de ce modèle.
Daimler de Grand Prix de 1906 en cours de restauration Gilles Bonnafous
600 en restauration par l'équipe spécialiste de ce modèle Gilles Bonnafous
Pour les Mercedes moins prestigieuses, les berlines notamment, le Classic Center ne s’avère pas nécessaire. De plus, le délai d’attente est long (au moins six mois) et le coût horaire de la main-d’œuvre assez élevé (100 € HT). Cela dit, un jeune collectionneur qui possédait une W 115, berline moyenne des années 70 dont la valeur ne dépasse pas les 10 000 € en très bon état, a dépensé 40 000 € pour la faire restaurer par le Classic Center…
L’activité de l’atelier ne serait pas ce qu’elle est sans le précieux soutien documentaire des archives, qui représentent un trésor inestimable. Tout ou presque a été conservé, dont les plans et les bleus d’usine, qui permettent de refabriquer les pièces introuvables. On peut y retrouver toutes les données sur pratiquement toutes les voitures vendues depuis 1890 : date et lieu d’achat, coordonnées de l’acquéreur, numéro de série de la carrosserie et du moteur, caractéristiques techniques du châssis, type et couleur de la carrosserie, de la sellerie et de la finition intérieure, etc.
Une singulière 600 carrossée en corbillard Gilles Bonnafous
Une 770 en fin de restauration Gilles Bonnafous
A partir du numéro de châssis, tous les renseignements sont communiqués au client sur sa voiture à sa sortie d’usine, sauf le nom du premier propriétaire par souci de confidentialité. Un très officiel certificat établi sur un papier imitant les diplômes de la fin du XIXe siècle peut être établi par le Classic Center au nom du propriétaire de la voiture — au prix de 100 €.
Hélas, DaimlerChrysler ne possède pas les archives Maybach, qui appartiennent à la société MTU Friedrichshafen, un fabricant de moteurs. Dans le passé, MTU (Motoren und Turbinen Union) faisait partie de la galaxie DaimlerChrysler, mais au début 2006, la société a été vendue au fonds privé suédois EQT.
Mercedes de 1904 à l'entretien Gilles Bonnafous
W 125 Gilles Bonnafous
Activité parallèle baptisée « Classic Events », le Classic Center pratique la location de voitures à des particuliers (mariages) et à des entreprises, qui invitent leurs meilleurs clients pour un week-end par exemple (« Driving Events »). Dans ce cas, la manifestation est entièrement organisée par le Classic Center (itinéraire de l’excursion, hôtellerie, restauration, etc.) et la flotte complète de dix voitures peut être louée. Tous les véhicules sont des cabriolets, dont plusieurs SL : 170 S cabriolet B, 220 cabriolet B, 300 SL roadster, 300 d cabriolet D, 190 SL, 220 SEb W111, trois Pagode (230 SL, 250 SL et 280 SL) et une 500 SL W107. Les tarifs dépendent de la voiture (1880 € TTC pour un week-end en 300 SL).
Une W 154 de 1939 Gilles Bonnafous
Le nuancier de la 190 SL Gilles Bonnafous
Enfin, le département « Classic Collection » commercialise des modèles réduits, dont certains de très haut de gamme, divers objets de collection, des livres, jouets, voitures à pédales, etc. Les collectionneurs peuvent également acquérir la littérature technique des anciens modèles (livrets d’utilisation, manuels d’atelier et de pièces détachées, etc.).
Pour répondre à une demande de plus en plus forte, Mercedes a ouvert en 2006 un Classic Center aux Etats-Unis, à Irvine en Californie. Le Classic Center de Stuttgart possède également des correspondants accrédités au Japon (un Classic Center devrait y être créé à court terme), ainsi qu’en Europe (plus de vingt), surtout en Allemagne, Suisse et Autriche.
Une 300S cabriolet dans le showroom Gilles Bonnafous
Une 600 en cours de restauration Gilles Bonnafous