Le nouveau visage Audi
Avec talent et inspiration, Gerd Pfefferlé et ses artistes élaborent le nouveau visage d’Audi au travers de la calandre "Single Frame" déclinée sur le SUV "Pike’s Peak", le coupé "Nuvolari Quattro" et le concept car "Le Mans Quattro".
sommaire :
Le Single Frame
Jean-François Destin le 10/09/2004
« Une bouche béante pour surprendre voire choquer, et une silhouette dynamique, sportive et chargée d’émotion » : Walter de’Silva, l’un des grands patrons du design du groupe Volkswagen avoue avoir un faible pour Audi. Même si Lamborghini, l‘un des deux autres fleurons de VW avec Bugatti relève de sa compétence, il a personnellement validé la métamorphose de la marque aux quatre anneaux. Depuis le début du nouveau millénaire, Gerd Pfefferlé, chef du design Audi AG, et les stylistes du studio d’Ingolstadt n’ont pas chômé. Le challenge relevait pourtant de l’exploit. Il fallait travailler sans relâche pour être capable dans la seule année 2003 de présenter trois concept-cars concernés par des catégories aussi variées que celles des SUV (Sport Utility Vehicle), des coupés de prestige et des sportives de haut niveau. Et pas des études en plâtre à roues fixes et sans moteur mais des modèles achevés quasi prêts à prendre la route.
De gauche à droite, Audi Pike’Peak, Audi Nuvolari Quattro, Audi Le Mans QuattroAudi A3 Sportback 2004 Audi
Un pari fou mais réussi par les successives apparitions de l’Audi Pike’Peak (à Détroit en janvier), du coupé Nuvolari (en mars 2004 à Genève) et de l’Audi Le Mans Quattro (au Salon de Francfort en septembre 2003). Les trois prototypes arborent des variantes de ce que Audi a baptisé le « Single Frame », une calandre énorme traversée par le pare-chocs supportant la plaque minéralogique. Une nouvelle signature inaugurée sur l’Audi A8 W12 et récemment étendue à la nouvelle A6 et dont bénéficieront tous les futurs modèles.
Chez BMW comme chez Mercedes, les rivaux directs, on n’a jamais exigé des designers de telles marches forcées. Même le décrié Chris Bangle chargé de dynamiter le style BMW n’a pas subi de telles pressions pour brûler les étapes. A Munich comme à Stuttgart, on a toujours veillé à sans cesse retravailler l’acquis en progressant par petites touches. Avec, c’est vrai, quelques audaces de niches çà et là.
Audi A3 Sportback 2004 Audi
Audi A6 2004 Audi
Pour Audi, l’électrochoc s’imposait. Né en 1910 et baptisé ainsi en latin par son fondateur Auguste Horch (audi et horch signifient écoute), Audi dont les quatre anneaux rappellent Auto Union et les marques DKW, Horch et Wanderer depuis disparues a toujours privilégié la technique au style. Certes, les collectionneurs ne seront pas d’accord en expliquant qu’aujourd’hui encore, un cabriolet Horsch 853 de 1937, pour ne citer que lui, reste une pièce rare mais dans le concert des belles d’avant guerre, Audi ne tient pas le haut du pavé.
Auto Union Type C 1937 D.R
Après les hostilités, mis à part l’Auto Union 1000 SP de 980 cm3 qui s’inspirait des lignes aéronautiques des américaines, les productions ne firent jamais référence. Il fallut attendre les débuts de l’Audi 60 en 1968 pour observer la première carrosserie moderne mais très classique lancée par Audi, Auto Union ayant été repris quelques années auparavant par Volkswagen.
En 1976, on pense que l’embauche de Hartmut Warkuss va donner du relief aux anonymes berlines bavaroises. Créatif, l’homme a fait ses preuves chez Mercedes puis chez Ford. Mais très vite, il devra composer avec Ferdinand Piëch, ingénieur de génie pour lequel la technologie reste une priorité. Certes, les modèles s’anoblissent et se rapprochent du haut de gamme mais à l’extérieur, le grand public ne retient que les innovations techniques. Et surtout cette transmission intégrale Quattro qui va permettre à Audi de régner sur le championnat du monde des rallyes des années 80 et à Walter Rorhl de collectionner les victoires.
Audi Quattro 1982 D.R
Warkuss ronge un peu son frein de ne pas pouvoir laisser son fusain traduire ses audaces. Même le superbe Quattro Spyder, présenté au Salon de Francfort en 91 rejoindra rapidement le musée. Les nouvelles gammes A3, A4, A6 et A8 ont beau faire référence en technologie, finition et qualité de construction, la séduction manque au catalogue.
A l’aube du nouveau millénaire, on comprend enfin chez Audi que la société a changé, que les clients veulent vivre de passions et qu’une berline haut de gamme ou une sportive s’achète aussi sur un coup de cœur. Mercedes, BMW, Jaguar, Aston Martin, Ferrari, Porsche et les autres l’ont intégré bien avant et marquent des points sur un marché élitiste et volatile. Même Cadillac réveille son design et se met en évidence avec une gamme époustouflante inspirée telle quelle des études Evoq.
Prototype Rosemeyer 2000 Audi
Quand Walter de’Silva, le père du renouveau d’Alfa Romeo débarque dans le groupe VW, il a carte blanche pour imaginer une nouvelle griffe susceptible de sortir Audi de son relatif anonymat. Son réflexe est de puiser dans les racines de la marque, d’établir une passerelle entre le passé et le présent comme Jaguar l’a fait avec la S-Type, format moderne de la Mark II des années 60. Mais dans le rétroviseur, rien ne lui semble valorisant et adaptable. Cependant, une image le taraude, celle de la calandre du fabuleux prototype Rosemeyer dévoilé en septembre 2000 par Audi avant son arrivée. Cette proue empruntée aux Auto Union de course des années 30 pourrait en la basculant vers le bas (pour avoir la grande largeur en haut) devenir un nouveau label.
Avec talent et inspiration, Gerd Pfefferlé et ses artistes vont exploiter cette entrée d’air en la minimisant sur la face avant aplatie de l’Audi Le Mans et en lui donnant une certaine majesté sur le SUV Pike’s Peak ou le coupé Nuvolari. Le nouveau visage d’Audi vient d’entrer dans la légende.
Audi Le Mans Quattro Audi
Audi Nuvolari Quattro Audi