Alfa Romeo GT, la tradition en héritage
Dévoilée en avant-première au Salon de Genève en mars 2003, l’Alfa Romeo GT est commercialisée depuis le début de l’année 2004. Elle reprend avec bonheur une longue tradition de Grand Tourisme typées initiée par la Giulietta Sprint, il y a cinquante ans.
sommaire :
Un enjeu national
le 14/04/2004
Comme nous l’avons vu, la première des Giulietta, le coupé baptisé Sprint, fut dévoilée en avril 1954. C’est le carrossier Bertone, dont le directeur du style, Franco Scaglione avait affiné les lignes esquissées chez Alfa Romeo, qui en assurait la production. La survie des carrossiers passait par cette évolution de leur activité, qui d’artisanale devenait industrielle, pour des raisons de survie. Mais tous ne surent pas négocier ce virage essentiel.
Alfa Romeo
Solidarité confraternelle
L’apparition et la multiplication des carrosseries autoporteuses après la guerre limitaient en effet considérablement le rôle des carrossiers spécialisés, faute de châssis séparés, faciles et économiques à habiller. Adapter des structures monocoques pour les transformer entraînait des frais et un travail qui faisaient dangereusement monter les prix. Une hausse qui réduisait la clientèle et le marché des carrosseries spéciales aux très haut de gamme sur lesquels le surcoût était proportionnellement moindre. Heureusement, Fiat et Alfa Romeo surent utiliser de façon judicieuse le savoir-faire et le potentiel de cet artisanat éminemment italien en lui confiant des séries spéciales qui les encombraient. Encore fallait-il que les carrossiers soient en mesure de construire en nombre suffisant avec des méthodes plus appropriées pour répondre à cette demande. Fiat et Alfa Romeo aidèrent financièrement la plupart des carrozzeria pour qu’elles puissent se moderniser, s’industrialiser et répondre à leurs besoins.
En se chargeant de la construction des séries les moins importantes, les carrossiers permettaient aux grands constructeurs de conserver tout leur potentiel pour la très grandes série. Ce qui arrangeait bien Alfa Romeo qui franchissait une nouvelle étape dans sa transformation avec la Giulietta dont le succès devait lui assurer une place parmi les grands constructeurs européens.En se déchargeant de ses coupés et cabriolets sur les carrossiers, Alfa Romeo leur assurait en plus une image flatteuse avec une grande signature de la carrosserie, comme une voiture hors série d’avant guerre ou comme une sportive de très haut de gamme à châssis tubulaire – comme les Ferrari et les Maserati – dont les modèles étaient assemblés à l’unité chez les meilleurs artisans italiens. Cela permettait également à une entreprise d’état – Alfa Romeo avait été nationalisée à la fin de la guerre – d’assurer du travail à un secteur particulièrement important de l’activité automobile et de maintenir une main d’œuvre nombreuse et qualifiée en activité. Fiat de son côté faisait de même, en aidant financièrement de petits carrossiers mais aussi en leur livrant des châssis spécialement aménagés de ses modèles de grande série pour qu’ils puissent exercer leur talent sur des bases populaires, plus faciles à vendre. Chacun y trouvait son compte et l’Italie devint le leader mondial du style et de la carrosserie. Tous les grands pays industriels, à commencer par les Etats-Unis, firent appel au savoir-faire de ses tôliers-formeurs et au talent de ses stylistes.
Alfa Romeo
Alfa Romeo
Autre carrossiers, autre Giulietta
Pinin Farina (son nom s’écrivait encore en deux mots à l’époque), de son côté, avait imaginé le très joli Spider Giulietta - sur un empattement de 2,20 m au lieu de 2,38 m pour la berline et le coupé - dévoilé en octobre 1955 au Salon de Paris, un peu éclipsé il faut bien l’avouer par la DS 19 de Citroën. Dessinée dans la même veine que sa Lancia Aurelia contemporaine, la petite Alfa Romeo avait, elle aussi, comme l’Aurelia Spider, été “ commandée ” par l’importateur américain Max Hoffman. Maximilien Hoffman avait débarqué de son Autriche natale à New York en 1941. Il avait trente-six ans et on prétend qu’il avait appris l’anglais en revoyant le même film jusqu’à ce qu’il ait tout compris des dialogues. En 1950, il ouvre “ The Hoffman Motor Car Co., Inc. ” au 487 Park Avenue, au niveau de la 57e rue. Il commence par importer des Jowett britanniques. Les voitures de sport européennes sont alors très en vogue à New York et sur la côte ouest, notamment les roadsters anglais rapportés par les GI en garnison en Europe. En 1952, Max Hoffman prend la distribution de Jaguar et l’importation de Mercedes-Benz. Il a réussi à convaincre Stuttgart de produire la 300 SL en série et a lancé Porsche en Amérique avec une petite série de 356 découvertes et allégées, le Roadster America, qui donnera plus tard naissance au fameux Speedster.
Giulietta Spider prototype Alfa Romeo
Giulietta Spider Alfa Romeo
Bertone ou Pinin Farina ?
En attendant, le succès des sportives européennes encourage Hoffman à insister pour avoir son spider Giulietta. Il s’engage à écouler 600 voitures. Chez Alfa Romeo, on est trop occupé pour s’occuper du spider. Deux modèles ont été mis en concurrence par Hoffman et exposés aux Etats-Unis, l’un par Bertone, l’autre par Pininfarina. Dépassé par les commandes de la Giulietta Sprint qu’il construit depuis plus d’un an, Bertone demande à Alfa Romeo de l’aider à financer une nouvelle extension de ses ateliers pour produire son spider. La marque ne peut répondre, elle-même trop absorbée par ses propres problèmes d’industrialisation pour la production de la berline. C’est finalement Pinin Farina qui va assurer la construction du Spider Giulietta pour Max Hoffman et le reste du monde avec le succès que l’on sait.