PEUGEOT 907

Dans la dynastie Peugeot, on compte deux types de concept-cars. Les uns ont un objectif précis : introduire auprès du public des nouvelles tendances esthétiques, le « préparer » au style des futurs modèles de la gamme. Les autres n'existent que... pour la beauté du geste !

Incontestablement, la Peugeot 907 appartient à cette dernière catégorie. Peugeot fut clair dès le départ : ce coupé ne se destinait à aucune carrière commerciale.

Large mais pas massive, sportive mais pas agressive, impressionnante mais pas intimidante, la 907 charme l'oeil. Le secret d'une telle réussite ? Une certaine modestie. « Nous voulions revisiter le Grand Tourisme des années cinquante » explique Jean-Christophe Bolle-Reddat, l'architecte des concept-cars Peugeot. « Aujourd'hui toutes les supercars sont très grandes et jouent la surenchère. Sur ce véhicule, nous avons voulu garder une certaine compacité, avec un empattement très court (2,50 m, soit 4 cm de moins qu'une 207 !), des proportions raisonnables et éviter de mettre des roues immenses. » Avec seulement 4,37 m de longueur, la 907 est 30 cm plus courte qu'une 407. Et si on la compare à une GT dont le style latin affiche quelques liens de parenté, telle que la Ferrari 612 Scaglietti, la 907 fait figure de naine, l'italienne frôlant les 5 mètres de long ! Voilà pour la modestie.

Car pour le reste, la Peugeot 907 n'a pas peur de s'affirmer. Sa calandre béante et le regard perçant que composent ses optiques trahissent son tempérament brûlant. Les ouïes d'aération et les échappements latéraux signent un profil digne d'une auto engagée en supertourisme. A l'arrière, un lion généreusement dimensionné vient habiller des surfaces épurées, seulement soulignées par un diffuseur aérodymanique.

Mais la pièce maîtresse de la 907 reste sa partie avant. Le compartiment moteur prend tellement ses aises qu'il rejette l'habitacle très en arrière ! L'interminable capot s'étire langoureusement entre un bec acéré portant le Lion Peugeot et une vitrine laissant apparaître les trompettes d'admission du spectaculaire V12.

Oui, vous avez bien lu : la 907 s'offre un douze cylindres, rien de moins ! Union de deux V6 de 407, qui partagent ici vilebrequin, arbres à cames et culasses, cet imposant bloc affiche une cylindrée de 6 litres et devait atteindre les 500 ch. Vérifié au banc, le V12 avoisine plutôt les 490 ch, mais les concepteurs de la 907 se hâtent de préciser qu'aucune optimisation n'a été effectuée, à l'exception de la mise au point standard destinée à lisser le comportement moteur. De fait, cette mécanique se révèle étonnamment docile à bas régimes, et seul l'embrayage viril embarrassera lors des démarrages.

La boîte six rapports transaxle (rattachée au pont arrière) permet d'optimiser la répartition des masses, le poids total n'excédant pas 1 400 kg. Avec un tel rapport poids/puissance, la 907 pourrait rivaliser avec une Ferrari F430. Reste que la Peugeot étant un exemplaire unique d'une valeur inestimable, pas question de la piloter « à fond ». Lors de cette sortie exceptionnelle sur l'anneau de Montlhéry, la 907 passera les chicanes à allure modérée et le V12 ne titillera pas la zone rouge. Dommage, car ses vocalises à mi-régime sont déjà prometteuses... Quant au châssis, il surprend par ses suspensions confortables, même sur le revêtement délabré de l'autodrome. Surprise aussi côté luminosité dans l'habitacle, grâce au pare-brise panoramique. La 907 réalise un étonnant mariage entre la puissance et l'équilibre. Et la qualité de réalisation de ce concept-car impose le respect...