Louis Vuitton Classic 2001
Traditionnel rendez-vous de la rentrée dédié à l'automobile d'exception, le Louis Vuitton Classic 2001, quatorzième du nom, offrait aux amateurs passionnés comme aux néophytes l'occasion de découvrir des voitures hors du commun.
sommaire :
BENZ Victoria
Gilles Bonnafous le 09/09/2001
Si le Louis Vuitton Classic permet d'admirer des voitures restaurées à la perfection, il offre également de découvrir des véhicules en état d'origine, une qualité dont on ne dira jamais assez le caractère irremplaçable. Le must en la matière était, pour l'édition de cette année, une Benz Victoria de 1894.
Motorlegend.com
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Dinosaure de l'histoire, la Benz Victoria renvoie aux premiers temps héroïques de la locomotion motorisée. Ancêtre émouvant, elle est aussi un modèle célèbrissime, l'un des mythes fondateurs de l'automobile. C'est en 1893 que Karl Benz présente la Victoria, sa première voiture à quatre roues. Jusqu'alors, il construisait à Mannheim un modèle à trois roues, dont la fabrication avait débuté en 1886. Pourquoi cette appellation triomphante ? La légende veut que Benz ait crié victoire en découvrant le système de réglage de l'essieu avant (il avait pris dès 1891 un brevet pour la direction d'une voiture à quatre roues).
La Victoria se présente sous la forme d'un véhicule hippomobile, contrairement à la trois roues, à qui la technique cycle donnait un aspect plus automobile. Elle est équipée d'un moteur monocylindre horizontal à quatre temps de deux litres de cylindrée (130 x 150 mm d'alésage/course) développant 3 ch à 470 tr/mn. La vitesse atteinte est de 20 km/h, avec une aptitude à grimper des côtes de 10%. Le carburateur est du type à léchage : l'air passe sur la surface de l'essence et s'enrichit de cette manière. Le mélange est réglé grâce à un papillon en fonction du temps : s'il fait froid, l'essence s'évapore moins, s'il fait chaud, on accroît le volume d'air. On utilise un carburant très léger qui s'évapore facilement, le naphte ou la benzine, que l'on trouvait jadis dans les pharmacies - comme le fit Berta Benz lors de son célèbre voyage qui l'amena en 1888 de Mannheim à Pforzheim avec une voiture à trois roues. Aujourd'hui, il faut s'approvisionner dans des magasins de produits chimiques spécialisés… La consommation oscille entre douze et quatorze litres aux cent kilomètres.
La boîte de vitesses possède deux rapports, l'entraînement se faisant par chaînes et la transmission primaire par courroies en cuir. Il n'y a donc pas d'embrayage. La voiture sera construite jusqu'en 1899, mais elle bénéficiera au fil des années d'un moteur plus puissant.
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Lente, la Benz Victoria affichait par contre de remarquables qualités de fiabilité et d'endurance. En juillet 1894, le baron Théodore von Liebig (le chimiste qui donna son nom aux conserves) effectua un légendaire périple au volant de sa Victoria. Parti de Reichenberg en Bohême (aujourd'hui Liberec en République tchèque), il rallia Reims et retour, soit 2500 kilomètres à travers quatre pays. Ce fut le premier grand voyage d'une voiture à pétrole.
La Victoria de Bagatelle a été achetée le 18 juillet 1894 par Alexander Gütermann, un industriel allemand. Après avoir été utilisée pendant une quinzaine d'années au transport de personnes, elle servit de prise de force pour entraîner des pompes à eau… Chose exceptionnelle, la voiture est demeurée dans la famille, qui en possède encore la facture originale. Aujourd'hui, c'est donc la cinquième génération qui monte à bord de la Victoria de l'aïeul ! En somme, une première main de 107 ans ! Sans doute un record. De plus, la machine n'a jamais été restaurée et elle se présente de nos jours dans son état d'origine. Elle est au monde la seule Victoria qui puisse se prévaloir d'un tel privilège. Fonctionnant parfaitement, la Victoria de la famille Gütermann était exposée moteur tournant (entre 150 et 200 tr/mn) sur la pelouse de Bagatelle. Et la mécanique fonctionnait comme une horloge !