Autojumble de Beaulieu 2003
Ses 2000 stands et ses 30 000 visiteurs font de l’Autojumble de Beaulieu la plus grande bourse d’Europe consacrée à l’automobile de collection.
sommaire :
KAISER 1951
Gilles Bonnafous le 13/09/2003
Avec son style glamour et sa livrée de couleur rouge, la Kaiser 1951 ne passait pas inaperçue au milieu d’un parterre de voitures très « british ». Un bouton d’or dans un champ de luzerne.
La belle Américaine était présentée par son vendeur comme unique au Royaume-Uni, une affirmation qui paraît crédible compte tenu de la rareté de cette voiture en Europe. Trois exemplaires sont recensés en France (en additionnant les millésimes de 1951 à 1954), dont un seul est roulant. Entièrement restaurée, la voiture se présentait, de plus, dans un état remarquable, qui justifiait le prix demandé de 8995 £.
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Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le milliardaire américain Henry J. Kaiser se lance dans l’automobile. Entrepreneur audacieux, l’homme a fait fortune dans la construction navale en fabriquant les célèbres Liberty Ships. Tout comme Preston Tucker, Henry J. Kaiser se lance à l’assaut des Trois Grands de Detroit — General Motors, Ford et Chrysler.
Henry J. Kaiser a besoin d’un homme du sérail, qu’il trouve en la personne de Joseph Frazer, un ancien de Graham-Paige, avec lequel il s’associe pour fonder la Kaiser-Frazer Corporation. Installée à Willow Run, dans le Michigan, la firme nouveau-née réalise l’exploit de lancer, dès le mois de juin 1946, une gamme de voitures entièrement inédite. Elle est déclinée en deux marques, Kaiser et Frazer, qui commercialisent des modèles clones. Bien que techniquement conventionnelles, ces voitures font sensation lors de leur présentation. Un succès qu’elles doivent à leur design novateur, entièrement ponton, qui les fait passer pour les voitures les plus modernes du moment.
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Les affaires démarrent bien, mais l’euphorie sera de courte durée. Avec la sortie en 1949 des nouvelles Chevrolet et Ford, la ligne des Kaiser et Frazer prend un coup de vieux. A la recherche d’un deuxième souffle, Kaiser lance une seconde génération de modèles construits sur la même base mécanique que les voitures de 1946. Car la firme n’a pas les moyens d’investir dans la construction d’un nouveau moteur. Son seul argument est donc le design, auquel Henry J. Kaiser consacre des moyens importants. Le département du style rassemble un brillant aréopage de talents, auquel se joignent des consultants extérieurs comme Howard Darrin.
C’est précisément le projet d’Howard Darrin qui a été retenu pour le design de la Kaiser 1951. Son style innovant fait grand bruit lors de son lancement en février 1950. Surbaissée – la hauteur ne dépasse pas 1,53 mètre, soit douze centimètres de moins qu’une Chevrolet —, la voiture se distingue par une ceinture de caisse incurvée plongeant vers la porte arrière, le « beltline dip » passé depuis à la postérité. Ainsi brisée, celle-ci donne naissance à un profil fin et dynamique, un effet subtil auquel participe la large baguette chromée disposée sur les bas de caisse et qui allège le ponton.
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La modernité et la légèreté de cette ligne tiennent aussi pour beaucoup à l’abaissement de la ligne du capot et du coffre au niveau des ailes. Quant au pavillon, ses rondeurs s’harmonisent aux courbes de la voiture, tandis que le pare-brise s’offre une ligne supérieure en forme de cœur, attribut repris sur la lunette arrière. Dépouillée, la face avant s’orne d’une fine calandre, qui contraste avec les motifs tarabiscotés des Plymouth ou même des Ford, sans parler des Buick ou des Cadillac.
Très spacieux malgré la faible hauteur de la voiture, l’habitacle permet à six adultes de trouver leurs aises sur les larges banquettes. Et la généreuse surface vitrée offre une visibilité remarquable. Dans le traitement de l’intérieur, Kaiser innove encore avec une planche de bord sécuritaire à la forme concave, dotée d’un épais rembourrage et dépourvue de tout élément saillant. A ces atouts, s’ajoutent un pare-brise éjectable vers l’avant en cas de choc et des ceintures de sécurité (en option), dont Kaiser est l’un des premiers constructeurs à équiper ses modèles. Ainsi pourvue, la Kaiser 1951 jouit dans le domaine de la sécurité passive d’une avance de vingt ans sur la concurrence. Ainsi, la publicité de la marque peut-elle vanter « la voiture la plus sûre du monde ».
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Comme ses aînées, la Kaiser 1951 est motorisée par un six cylindres Continental de 3,7 litres baptisé sans complexe « Supersonic ». Un qualificatif pour le moins fanfaron compte tenu du caractère latéral de la distribution. Toutefois, les moteurs à soupapes latérales sont monnaie courante aux Etats-Unis au début des années cinquante. Et contrairement à une idée reçue, la puissance de ce groupe est tout à fait satisfaisante — 115 ch en 1951, un niveau équivalent à celui de nombreux six cylindres concurrents. La boîte de vitesses à trois rapports peut recevoir en option un overdrive, ou céder la place à une transmission automatique Hydra-Matic fournie par General Motors. Si la Kaiser bénéficie de performances tout à fait satisfaisantes, elle les doit également à l’une de ses spécificités, sa légèreté (1450 kilos).
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Dopées par le nouveau modèle, les ventes repartent en 1951. Baptisée Manhattan, la Kaiser 1952 s’offre un remodelage important qui ajoute beaucoup au charme de la voiture. Grâce à un nouveau lifting en 1954, la ligne de la Manhattan connaîtra une longévité remarquable pour un modèle américain. Hélas, ces artifices cosmétiques n’arrêteront pas la chute des ventes, imputable à une technologie dépassée, et la marque cessera sa production en juin 1955. C’est en Argentine que la Manhattan, rebaptisée Carabela, poursuivra sa carrière jusqu’en 1962.
Si l’aventure industrielle d’Henry J. Kaiser n’a duré que dix ans, elle a laissé une marque profonde dans l’histoire de l’automobile d’outre-Atlantique : en jouant un rôle pionnier dans la conception d’un habitacle sécuritaire et, surtout, en offrant à l’automobile américaine l’une de ses plus belles et innovantes créations stylistiques.
La Manhattan 1953, la plus belle des Kaiser D.R