Essai NISSAN GT-R 2012
Loïc Bailliard le 27/10/2011
Nous avons été à Silverstone afin de découvrir en avant première la dernière évolution de la Nissan GT-R. A cette occasion, nous avons pu rencontrer son concepteur, Kazutoshi Mizuno.
La vision d'un homme
La GT-R est un modèle totalement à part chez Nissan, et dans le milieu automobile d'une façon générale. Construite sous la direction toute puissante de Kazutoshi Mizuno, ingénieur notamment responsable à l'époque de l'engagement aux 24h du Mans des R90, elle ne répond pas aux règles traditionnellement établies dans la construction d'une gamme, avec des véhicules faceliftés en mi-carrière et renouvelés après plusieurs années.
Ceci s'explique par la personnalité de ce fameux « Mizuno San », que nous avons eu la chance de rencontrer à Silverstone lors d'une prise en main exclusive de la Nissan GT-R version 2012. Personnalité entière, extrême et dotée d'une vision très précise de son projet, Kazutoshi Mizuno conçoit l'ingénierie comme un véritable art qu'il perfectionne tous les jours, mêlant la haute technologie à une vision empreinte de traditions. Fait rarissime dans le monde automobile, il reçu une carte blanche complète de Carlos Ghosn lors du lancement du projet R35. Et il en maîtrise tous les détails, du développement à la fabrication.
La technologie apparaît comme la clé absolue de la compréhension de la GT-R. Chaque courbe, chaque trait, chaque élément doit sa place à une recherche d'efficacité et d'efficience, au point que l'on se demande dans quelle mesure le moindre designer fantaisiste a pu participer au processus de création de la ligne de la voiture. Mais le résultat est là, avec un modèle d'une finesse extraordinaire (0,26 de cx), et suffisamment travaillé pour que l'appui aérodynamique enterre l'ensemble de ses concurrentes.
Le moteur bénéficie également de l'expérience en compétition de Mizuno San. Ce dernier insiste notamment sur le fait que les cylindres du V6 biturbo encaissent des températures de 1150°, un chiffre qu'aucune supercar moderne ne serait capable de battre selon lui.
Le client avant tout
Au cœur de sa vision, le client importe plus que tout. Kazutoshi Mizuno développe cette idée autour de plusieurs axes : la Nissan GT-R repose selon lui sur la base de la « multi-performance », un principe qu'il valide en personne en conditions réelles, qu'il faille percuter une congère de plein fouet ou prendre 300 km/h sur les autoroutes ensablées des Emirats Arabes Unis.
Sa réaction à l'évocation du downsizing ou de la réduction de poids dévoile une autre facette de sa personnalité. L'homme semble désintéressé par cette idée ne présentant pas de défi d'ingénierie : « gagner en consommation ou en performance en réduisant le poids ou en baissant la puissance du moteur, c'est trop simple. Moi, ce que les clients me demandent, c'est plus de puissance, plus de puissance et plus de puissance. Ensuite, j'essaie de réduire la consommation et d'améliorer l'efficience. Pas pour répondre aux normes CAFE aux Etats-Unis, pas pour faire plaisir à l'entreprise, mais pour satisfaire mes clients ». Inutile d'attendre une GT-R Lightweight ou Superleggera, donc...
Il reconnaît aisément que l'achat d'une telle voiture ne se fait pas sur le seul critère de la performance, mais permettra de flatter l'égo de son propriétaire. Un besoin auquel répond la version Egoist. Et ici aussi, sa vision singulière nous offre une clé de compréhension sur ce modèle - tarifé environ le double d'une GT-R normale - en insistant sur l'aspect « fait sous les yeux du client » : la Nissan GT-R Egoist a en effet le droit à un atelier spécifique au sein de l'usine.
L'acheteur peut ainsi venir découvrir sa voiture lors des derniers processus de fabrication, alors qu'un cuir unique au monde (couleur et épaisseur sont sur-mesure) est apposé dans l'habitacle. Il compare la pratique avec celle du chef sushi, cuisinant devant ses hôtes.
La Nissan GT-R MY12
Comme tout artiste ou « sportif de haut niveau qui s'améliore en permanence », Kazutoshi Mizuno considère que son travail n'est jamais achevé. C'est la raison pour laquelle la Nissan GT-R continue à évoluer encore et toujours. On pensait que le modèle 2011 avait atteint un niveau d'excellence quasi imbattable, Nissan remet pourtant le couvert avec un MY12 ou « Model Year 2012 » encore affiné.
Si les chiffres exacts ne seront dévoilés que le 7 novembre 2011, plusieurs détails nous ont déjà été révélés. Grâce à des améliorations au niveau de l'admission, des têtes de cylindres, de l'échangeur d'air, de l'échappement et de l'électronique, la puissance et le couple devraient grimper une nouvelle fois (nous parions sur 550 ch et 642 Nm mais ces chiffres ne sont que spéculation), bien que le couple maximal ne tienne désormais que jusqu'à 5 800 tr/min, contre 6 000 auparavant. La consommation baisse pour sa part, passant de 12 l/100 km à 11,x l/100 km (le « x » reste à préciser).
Ces modifications permettront d'effectuer le 0 à 100 km/h en moins de 3 secondes contre 3,0 sec annoncées précédemment. Le 400 mètres D.A. passe quant à lui dans la zone des 10 et quelques secondes. Le temps au tour réalisé sur le Nürburgring en septembre dernier doit également être annoncé le 7 novembre.
Si la GT-R ne change pas physiquement, elle ne se contente toutefois pas de gagner en puissance. La géométrie arrière a également été revue sur les modèles européens (les versions en conduite à droite voient leurs suspensions avant changées au profit d'un réglage asymétrique). Enfin, les finitions Premium et Egoist pourront bénéficier de freins carbone-céramique en option, tandis que la caméra de recul passe en série sur tous les modèles.
Au volant pour 3 tours d'une portion du circuit de Silverstone, difficile de se rendre compte des progrès. Sur ce modèle britannique, on constate bien un léger changement lors des tests de launch control et freinages par rapport à une conduite à droite de 2011. La légère tendance à dévier vers la droite (liée au poids du transaxle additionné au pilote, ajoutant une charge de 50 kg sur la roue avant droite) semble corrigée, mais ce détail ne concerne pas notre marché. Le museau apparaît comme un peu plus rivé à la route, mais il est difficile de faire la part entre changement d'adhérence de la piste et amélioration technique. Enfin, la GT-R 2011 tenant déjà de la catapulte, on peine à ressentir en aussi peu de temps la différence de puissance. La sonorité change très (trop ?) subtilement. La Nissan GT-R n'a de toute façon jamais été réputée pour ses vocalises.
Mais alors, cela signifie-t-il que cette évolution n'est pas utile ? Certainement pas. Les clients apprécieront toujours un cran supplémentaire de performances, et franchir le cap des 2,x secondes au 0 à 100 km/h est hautement symbolique pour l'image de la GT-R. Pour autant, ce modèle 2012 offrira-t-il suffisamment pour faire renouveler un acheteur de 2011 ? On en doute. La révélation officielle devrait nous en apprendre plus. Rendez-vous le 7 novembre, donc.