Essai MORGAN + 4
Vincent Desmonts le 11/01/2021
Les Morgan se refont une jeunesse avec une toute nouvelle plate-forme, un équipement enrichi et de nouveaux moteurs turbo. L'esprit « vintage » est-il toujours là ?
Machine à remonter le temps
L'automobile connaît actuellement sa plus grande mutation depuis qu'elle a été inventée, à la fin du XIXe siècle. Évolution des usages, électrification, promesses de la conduite autonome… L'avenir de l'industrie n'a jamais été aussi incertain, ni aussi mouvant. Dans ce monde en perpétuel mouvement, il reste cependant des points fixes, des références insensibles au temps qui passe. Morgan est de celles-là. Peu de marques sont en effet restées aussi fidèles à leur héritage, en cultivant contre vents et marées une fidélité aux traditions ancestrales de l'automobile, que ce soit en termes de style que de fonctionnalités ou de méthodes d'assemblage. D'ailleurs, à première vue, pas grand-chose ne différencie notre + 4 d'essai d'une Morgan des années cinquante. Et pourtant, tout est nouveau sur cette belle anglaise ! En effet, un constructeur automobile a beau cultiver la fibre nostalgique, il doit tout de même se plier à des normes européennes de plus en plus drastiques, que ce soit en termes de sécurité active et passive ou en matière d'émissions polluantes. Si bien que, même quand on s'appelle Morgan, il faut parfois savoir faire table rase du passé !
Tout changer pour que rien ne change
C'est pourquoi cette nouvelle Morgan + 4, tout comme sa grande sœur, la + 6 – adopte une plate-forme inédite en aluminium collé, baptisée CX. Mieux (ou pire, c'est selon) : 97 % des composants de cette Morgan sont inédits ! Au premier abord, à part les optiques à Leds, difficile de deviner que la + 4 est un tout nouveau modèle. Elle reprend en effet la calandre caractéristique des anciens modèles, le long capot ajouré, les ailes qui s'étendent jusqu'aux passages de roues arrière, les portières échancrées, et pousse le cliché jusqu'à installer sa roue de secours sur la malle arrière (en option). Mais lorsqu'on vous tend les clés, surprise : il y a un plip ! Oui, la Morgan + 4 dispose du verrouillage centralisé. Mais ce n'est pas tout, puisqu'elle bénéficie également d'une direction assistée, d'une instrumentation sur écran à cristaux liquides, d'un ordinateur de bord, d'un thermomètre de température extérieure et d'un ABS ! Une dotation de série étonnamment généreuse pour la marque, qui peut être complétée par la climatisation (1 554 €), les sièges chauffants (696 €) et même… une interface audio Bluetooth (462 €). Rassurez-vous, les autres suppléments de l'épais catalogue ne concernent que la cosmétique : peinture, jantes, coloris des étriers de freins, teinte du cuir des sièges, de la moquette et de la capote, broderies, inserts décoratifs… Tout est possible, à condition d'y mettre le prix. Car l'assemblage d'une Morgan reste encore largement artisanal… et ça se ressent : tout n'est pas parfait, mais c'est aussi ça, le charme du « fait main ».
Châssis bois et moteur turbo
La plate-forme, donc, est entièrement nouvelle. Mais les fans de Morgan seront ravis d'apprendre qu'elle comprend toujours des éléments en bois, que l'on aperçoit d'ailleurs à l'ouverture des portières ou si l'on soulève le capot. Bien entendu, ces pièces n'ont aucun rôle structurel (les crash-tests ont pas mal évolué depuis les années cinquante!), mais elles viennent honorer les traditions. Côté moteur, la firme britannique a fait appel à son partenaire historique : BMW. Impossible en effet pour un si petit constructeur de mettre au point son propre moteur. D'une part parce que c'est coûteux à concevoir, à adapter dans le temps (notamment aux normes antipollution) et également très cher à produire. La Plus Four adopte par conséquent le 4-cylindres 2.0 turbo « B48 », déjà utilisé par la 330i ou le roadster Z4, qui développe ici 258 ch. Il est associé au choix à une boîte manuelle à 6 rapports (avec dans ce cas un couple bridé à 350 Nm), ou – comme ici – à une transmission automatique à 8 rapports, auquel cas on bénéficie de la totalité des 400 Nm de couple.
Prise en mains facilitée
Une boîte automatique sur une auto privilégiant l'authenticité des sensations : sacrilège ? Peut-être. Mais pour ces premiers kilomètres dans Paris, entre pluie et embouteillages, il faut avouer que le fait de ne pas avoir à gérer une troisième pédale facilite grandement la prise en main, même si cette transmission semble toujours hésiter entre deux rapports. Dans le même ordre d'idées, la direction assistée électrique rend l'auto très maniable. Et ça tombe bien, car vu la fermeté des suspensions, il faut zigzaguer entre les (nombreux) nids de poule ! La position de conduite est correcte, notamment grâce au volant qui se règle dans les deux plans. Mais les sièges sont perfectibles : assises courtes, dossiers manquant de maintien. On note bien quelques éléments issus de la grande série dans ce petit habitacle, comme les comodos d'origine PSA, le volant de Lotus Evora ou le sélecteur de boîte automatique signé BMW. Mais les autres commandes sont « maison », et plutôt agréables à manipuler.
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Ça déménage !
Il y a une constante chez les Morgan : la légèreté. La + 4 ne pèse ainsi que 1 013 kg. Forcément, avec si peu de masse à tracter, le 2.0 turbo se sent pousser des ailes ! Le 0 à 100 km/h est ainsi expédié en 4,8 s (5,2 s pour la version à boîte manuelle), tandis que la vitesse maxi est annoncée à 240 km/h. Des accélérations de Porsche 718 Cayman, mais en ayant les fesses au ras du bitume et la tête baignée de courants d'air ! La Morgan + 4 est ainsi capable de mises en vitesse qui surprendront bien des quidams, étonnés qu'une « ancienne » puisse avoir des performances aussi contemporaines… Mais si les chronos dont est capable cette Morgan sont très actuels, les sensations procurées par le châssis sont elles bien « vintage » ! En effet, la Morgan + 4 fait toujours l'impasse sur l'antipatinage ou l'ESP. Du coup, vu les caractéristiques des courbes de puissance et de couple du moteur turbo, c'est à vous d'utiliser la pédale de droite avec la circonspection qui s'impose. C'est particulièrement vrai sur le mouillé : malgré la présence d'un moderne train arrière multibras, les pneus restent petits (205 de large) et les dérobades du postérieur ne sont pas rares. Le travail du conducteur n'est en outre pas facilité par une direction manquant de ressenti, qui complique la détection du niveau de grip disponible. Vous voilà prévenus !
À retenir
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20
- Accélération
- Reprises
- Direction
- Agilité du châssis
- Position de conduite
- Commande de boîte
- Etagement de la boîte
- Adhérence
- Freinage
- Equipements de
sécurité
- Habitabilité
- Volume du coffre
- Visibilité
- Espaces de rangement
- Confort de suspension
- Confort des sièges
- Insonorisation
- Qualité (matériaux, assemblage, finitions)
- Rapport prix/prestations
- Tarif des options
- Consommation