Essai MERCEDES CL 600
Gilles Bonnafous le 15/04/2000
La Mercedes CL apparaît comme un condensé de technologie sous une robe somptueuse. Performances, sécurité, confort et silence sont déclinés en mode superlatif.
Présentation
Un condensé de technologie sous une robe somptueuse. Ainsi apparaît le top modèle de la gamme de Stuttgart. Performances, sécurité, confort et silence sont déclinés en mode superlatif. Pour vous, nous avons essayé le coupé Mercedes CL 600 sur les routes de Haute Provence.
La surenchère technologique, nous savions. A l'image des constructeurs allemands, Mercedes nous a habitués depuis longtemps à son savoir faire en ce domaine. La qualité de construction, aussi. L'apport du coupé Mercedes CL 600 n'est pas là. Sa grande nouveauté, c'est son design. Héritier d'une prestigieuse lignée haut de gamme, le mercedes CL 600 ouvre une voie nouvelle dans le design des coupés Classe S. Une nouvelle option a été prise, avec un look sportif qui témoigne des nouvelles dispositions de DaimlerChrysler. Classe A, Smart, roadsters décoiffants, esthétique revigorée, Mercedes ose. La firme de Stuttgart, qu'on a connue plus réservée, a viré sa cuti. Pour notre plus grand plaisir, l'étoile fait sa révolution !
Design
Par bonheur, le modèle phare de la gamme Mercedes tranche nettement avec le classicisme engoncé et un peu terne de son prédécesseur. Finies allure statutaire et formes massives. Le nouveau né a une âme, il suggère la vitesse, il provoque l'émotion et la passion. Fluidité et dynamisme caractérisent l'art nouveau du CL. Le trait majeur de cette création réside dans le somptueux dessin du pavillon en forme de voûte. La ligne de toit dessine un arc de tension qui vient se fondre dans des montants de custode aussi fins qu'élégants. Nous avons rencontré Peter Arcadipane, le designer de la voiture, et il nous a confié que sa formation d'architecte n'était pas étrangère à ces formes très " architectoniques ". La pureté de son style, notamment la silhouette énergique de la custode et la lunette arrière panoramique, évoque le coupé de la génération W 111 né en 1961, un chef d'œuvre indémodable dû au talent de Paul Bracq. Réinterprétée, cette fidélité à un passé prestigieux marie adroitement modernité et tradition.
Grâce à la fluidité de son dessin, la voiture rend discrète sa respectable longueur de cinq mètres, même si la hauteur a été abaissée de 54 millimètres et l'empattement réduit de six centimètres par rapport au modèle précédent. Pour autant, l'espace intérieur dont jouissent les passagers avant est comparable à celui de la Classe S — hormis la garde au toit. Belle sous tous les angles, c'est de profil et vue de trois-quarts arrière que la voiture apparaît sous son meilleur jour. Superbe réussite esthétique, le nouveau coupé haut de gamme Mercedes est d'ores et déjà une voiture de collection…
Technologie
Ouvrons maintenant le chapitre des sophistications technologiques, dont la voiture regorge. Mercedes a tenté de résoudre la quadrature du cercle pour concilier confort et comportement dynamique. Conçue à cette fin, la suspension active ABC (Active Body Control) adapte l'amortissement de la voiture à la situation de la route en une fraction de seconde. Elle permet ainsi de réduire les mouvements de la caisse — plongée, cabrage et roulis. De plus, le CL reçoit un correcteur d'assiette automatique, qui agit en fonction de l'état de charge du véhicule. Le conducteur peut également faire varier manuellement la garde au sol — il a le choix entre la relever de 25 ou de 50 millimètres. Si la vitesse augmente, la carrosserie s'abaisse progressivement jusqu'au niveau normal, et même en dessous (de 10 mm) pour réduire la résistance aérodynamique.
Les ingénieurs de Stuttgart ont encore doté le coupé CL de nombreuses innovations, dont le système électronique de contrôle de la pression des pneus (en option), la commande automatique des feux de croisement par capteur logé dans le pare-brise, un climatiseur automatique, ainsi qu'un capteur multifonctions mesurant le taux d'humidité de l'air et la concentration de polluants dans l'atmosphère… La voiture bénéficie évidemment des équipements propres à la Classe S : régulateur de vitesse et de distance DISTRONIC (en option), contrôle ESP, ventilation active des sièges, système de navigation DynAPS, etc.
Moteur
L'enrichissement croissant des équipements de sécurité et de confort coûte cher en poids. Avec pour sanction le risque de dérive vers des sommets incompatibles avec un comportement routier dynamique et l'indispensable réduction de la consommation (effet de serre oblige). Le coupé CL a donc subi une cure d'allégement. Un vrai remède de cheval : 340 kilos ont été gagnés sur le modèle précédent grâce à la construction hybride de la carrosserie. Celle-ci fait appel à quatre matériaux : acier, plastique, aluminium et magnésium. On a retenu l'aluminium pour le capot moteur, les ailes arrière et le pavillon, le plastique pour les ailes avant et le couvercle de coffre, tandis que l'intérieur des portes est réalisé en magnésium. Par ailleurs, ces dernières sont dotées de charnières à articulations multiples, qui permettent de monter dans la voiture sans avoir à se contorsionner lorsque celle-ci est garée dans des lieux exigus, notamment les parkings (système également adopté sur la Renault Avantime).
Le coupé CL est proposé en deux motorisations, un V8 de 5 litres développant 306 ch et un V12 de 5,8 litres offrant 367 ch (sans parler de la version sportive 55 AMG au V8 de 5,4 litres et 360 ch). Le V12 bénéficie d'une consommation réduite grâce à la coupure automatique d'alimentation des cylindres — celle-ci se faisant par rangée de V. L'appétit se monte ainsi à 13,9 litres aux 100 km (consommation mixte selon le nouveau cycle européen), soit une réduction de l'ordre de 20% par rapport au précédent V12. Par ailleurs, cette mécanique satisfait déjà aux normes anti-pollution Euro 4, qui entreront en vigueur en 2005.
Habitacle
Après avoir effleuré la porte de notre sésame — la carte magnétique du système Keyless-Go qui remplace la clé de contact —, nous voici installé au volant du coupé V12. L'habitacle bicolore rompt avantageusement avec la triste rigueur à laquelle Mercedes nous avait habitués avec les modèles précédents — justement, on ne se résignait pas à cette habitude… Enfin des couleurs ! Qui s'harmonisent avec les boiseries (au choix en ronce de noyer ou châtaignier) et les cuirs de la meilleure facture (Nappa et Alcantara). Au-dessus de tout soupçon, l'équipement de sécurité comprend toute une collection d'airbags, celui du passager étant doté d'un système à double seuil de déclenchement (en fonction de la gravité de l'accident). De nouveaux sièges, dits intégraux, incorporent les éléments des ceintures de sécurité. Seule ombre au tableau, la visibilité vers l'avant pâtit des montants de pare-brise très inclinés.
Sur la route
Une simple impulsion sur le levier de vitesses libère la cavalerie, et nous sommes partis sur les petites routes de Haute Provence. Le parcours de notre essai emprunte l'itinéraire de plusieurs spéciales du rallye de Monte-Carlo et du rallye du Var. Certes, ces routes difficiles ne représentent pas le jardin d'Eden du coupé CL. Toutefois, elles constituent un test exigeant du comportement dynamique et du confort de la voiture observés dans des conditions limites.
Bien que ce coupé ne puisse être considéré comme un modèle sportif, il prouve néanmoins sa capacité à réaliser sur ce terrain des moyennes de haut niveau. Onctueux à souhait, le moteur offre une puissance toujours disponible et l'énorme couple de 530 Nm requiert quelque circonspection en sortie de virage… Tout ceci dans un silence impressionnant, qu'habite seul le chant discret du V12 et les rugissements feutrés de ses montées en régime. Même dans des conditions de conduite sportive, le confort reste excellent grâce à la suspension pneumatique — seul le maintien latéral n'est pas à la hauteur.
La boîte automatique à cinq rapports est un régal, de même que sa commande manuelle par impulsion : il suffit de pousser légèrement le sélecteur vers la gauche ou la droite pour descendre ou monter les vitesses. Le levier tombe parfaitement sous la main et sa réactivité instantanée autorise des passages de vitesses ultra rapides.
Dans les vifs enchaînements de virages serrés, la tenue de route avoue naturellement ses limites, bien que la suspension active ABC soit réglée en conduite " sport " — les deux positions, sport ou confort, sont sélectionnées par une touche placée sur la console centrale. Entre l'efficacité du comportement et les impératifs de confort, Mercedes ne pouvait qu'arbitrer en faveur de ce dernier. Surtout, la voiture révèle une grande inertie aisément imputable à ses deux tonnes… Les lois de la physique sont incontournables et le poids du moteur apparaît bien présent sur le train avant. Mais il ne faut pas demander à cette bourgeoise à hautes performances ce pour quoi elle n'a pas été conçue. Souverain sur autoroute, ce luxueux salon trouve son royaume dans les voyages au long cours, où il avale le bitume à 250 km/h (hors de France bien entendu !) dans des conditions de confort et de sécurité exceptionnelles.
Avec le coupé CL, Mercedes vise une part du marché mondial des coupés de prestige évaluée à 30%, soit une diffusion prévisionnelle de 50 000 exemplaires sur toute la durée de vie du modèle. En 2000, 9000 voitures environ ont été produites, dont un contingent de 150 pour le marché français. Proposé en trois versions — 500, 600 et 55 AMG —, le coupé CL est commercialisé à partir de 682 000 francs. La perfection a son prix…