Essai FORD USA GT
Nicolas Valeano le 11/09/2017
De GT, l'itération 2017 de la mythique GT 40 n'a que le nom et quelques gimmicks esthétiques. Car c'est bien une vraie voiture de course que Ford a conçu là, avec Le Mans, l'image et un regain de prestige comme objectifs. Un pari commercial réussi pour cette auto, au volant de laquelle nous avons pu nous faire quelques impressions dans son milieu naturel, la piste.
Echappée du paddock
Il n'y a que deux exemplaires de la Ford GT en Europe et ils sont là, devant moi, sous le soleil de la fin d'été qui baigne le Massif Central. L'une est jaune canari souligné de bandes noires, l'autre, bleu métal, rappelant le modèle qui a été révélé à la surprise générale au Salon de Detroit en janvier 2015. Justement, j'y étais et, une fois l'effet de surprise passé, il avait fallu se concentrer sur les caractéristiques de cette supercar pas comme les autres, à commencer par la nouvelle Honda NSX révélée en même temps. Car si la japonaise suivait la tendance forte de l'hybridation sur ce genre de voitures, l'américaine avait préféré faire simple et classique. Un moteur purement thermique, une propulsion, et une définition on ne peut plus sportive amplement transmise par son look absolument racing. Il faut dire que la gestation de l'auto a été guidée par un souci principal : la recherche de l'efficacité maximum en conditions de course avec, dans la tête des ingénieurs et aérodynamiciens, les contraintes de course du Mans, dont elle a gagné sa catégorie pile pour célébrer le cinquantenaire de la victoire de la GT 40 en son temps. Au contraire des Ferrari 488 et autres Porsche 911 courant en GTE, la Ford n'est pas élaborée à partir d'une voiture de série mais c'est bien la voiture de course qui est homologuée pour la route. Ford avait bien commencé un projet de développement sur base de Mustang, mais la lourde et massive auto partait avec un trop gros handicap pour pouvoir être compétitive. Tant mieux, ainsi pouvons-nous admirer aujourd'hui les lignes de la GT.
Aérodynamique et style en cohabitation pacifique
Et on ne se lasse pas de détailler la carrosserie de la bête tant elle se montre riche en détails, tant ses proportions semblent évoluer selon l'angle d'observation. Longue (4,78 m), basse (1,11 m) et très large (2,24 m avec les rétros !), la GT est particulièrement élancée, se terminant par un long porte-à-faux arrière et un spectaculaire aileron rétractable. Ford a pris un juste parti à mon sens avec un compromis avec des clins d'œil rétros (la forme de phares rappelle la GT d'origine) mais sans tomber dans le néo-rétro du modèle sorti en 2005, avec ici un parti-pris résolument moderne et très spectaculaire. Par exemple, la façon dont le « fuselage » (c'est le terme employé en anglais dans le texte par Jamal Hameedi, responsable des programmes Ford Performance) se resserre autour du compartiment moteur, créant un tunnel ouvert le séparant des passages de roues, est une des grandes réussites du design de l'auto. La forme est guidée par la fonction mais il est impossible de croire que les designers n'aient pas gardé la main pour obtenir des lignes aussi harmonieuses. L'habitacle très compact au pare-brise panoramique contraste avec les galbes et grands espaces de la carrosserie. Les feux arrière ronds intègrent l'évacuation de l'air des échangeurs des deux turbos, tandis que les échappements font partie intégrante de la face arrière. Bestial et diablement séduisant.
Cockpit taille S
Malgré des pontons assez larges, les portes en élytres dégagent bien l'accès qui est assez aisé. Calé dans le baquet solidaire de la coque tout carbone qui intègre également la planche de bord, il faudra régler volant et pédalier pour (facilement) trouver la bonne position de conduite. Ou plutôt de pilotage, tant on se trouve ici dans une ambiance typée course. Beaucoup de carbone, du cuir, un peu d'aluminium apparent une fois la porte ouverte : nous sommes dans un monde de matériaux essentiels. Inutile de chercher toute coquetterie, ici, le luxe est brut de décoffrage. Mais cela ne veut pas dire que l'habitacle a été négligé, au contraire, tout est dessiné pour offrir une belle personnalité à l'ensemble. Le petit volant au double méplat intègre toutes les fonctions d'habitude sur des commodos. Déjà, l'instructeur m'explique les différentes fonctions disponibles, dont l'indispensable molette de choix des modes de conduite. Il me demande de choisir le mode Track, et immédiatement la voiture descend brutalement d'un cran pour atteindre 70 mm de garde au sol (-5 cm). Ambiance. De quoi attaquer la piste d'essai du centre de tests de Michelin à Ladoux, utilisée pour la première fois pour un essai presse comme celui-là. Il est vrai que c'est le manufacturier français qui est le fournisseur des Pilot Sport 2 en 245 et 325 qui équipent le monstre. Nous voici prêts pour quelques tours de piste pour essayer d'appréhender une petite partie du potentiel de ce pur sang.
Bête de piste
Je repense à ce moteur compact derrière mon dos, un « simple » V6 seulement alors que les concurrentes font chanter au moins deux cylindres de plus. Avec sa double injection et ses deux turbos, il développe la bagatelle de 656 ch et offre une belle courbe de couple bien plate, soutenu par un système compensant le temps de réponse grâce à un système laissant tourner les turbos lorsque l'on ne sollicite pas l'accélérateur. Le rapport poids-puissance est très favorable avec 1 385 kg sur la balance. L'ensemble est arrêté par de très méchants disques carbone-céramique (396 mm à l'avant) freinés par des étriers signés Brembo (6 pistons à l'avant)… De quoi se rassurer au moment où l'on s'élance. Après un tour de chauffe qui permet de s'apercevoir que la direction à assistance hydraulique est directe, mais un peu lourde et la commande de la boîte 7 double embrayage Getrag d'une rapidité bluffante, les premières accélérations plus poussées montrent que de poussées justement, la voiture ne manque pas. Sans inertie, dans un bruit rageur à défaut d'être très noble, le V6 allume une à une à vitesse grand V les diodes des shift-lights intégrées au volant. Les bruits dans l'habitacle sont ceux d'une voiture de course sans filtre, confirmant les doutes que l'on peut avoir quant aux capacités routières de l'auto. Une GT ? Certainement pas, c'est bien d'une pure sportive qu'il s'agit et c'est très bien comme cela. D'autant que la voiture est facile à manier et que le chemin pour exploiter son potentiel de haute volée semble bien long, alors que déjà, il me faut ralentir pour laisser l'engin refroidir et le prochain confrère monter dans le baquet. Je suis triste de laisser le volant mais heureux de rendre cette auto de un demi-million d'euros en état, d'autant plus précieuse que vu la demande qu'elle suscite, il ne suffit pas d'avoir cette somme pour pouvoir y accéder mais il faut répondre aux critères fixés par Ford (garder l'auto un certain temps et la faire rouler, histoire d'éviter la spéculation) pour prétendre à une chance. Ford voulait créer une voiture d'exception, c'est certainement le cas à plus d'un titre.
À retenir
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20
- Accélération
- Reprises
- Direction
- Agilité du châssis
- Position de conduite
- Commande de boîte
- Etagement de la boîte
- Adhérence
- Freinage
- Equipements de
sécurité
- Habitabilité
- Volume du coffre
- Visibilité
- Espaces de rangement
- Confort de suspension
- Confort des sièges
- Insonorisation
- Qualité (matériaux, assemblage, finitions)
- Rapport prix/prestations
- Tarif des options
- Consommation