Technique : Rouler au sans-plomb
le 04/08/2005
Le super n'est plus ce qu'il était. Certes, cela fait bien des années que le super n'a plus autant de plomb qu'auparavant et, malgré cela, nos moteurs tournent toujours.
A l'origine le Super plombé avait un grammage de tétrahéthyl de plomb de 0,7g2 gr/litre Depuis une quinzaine d'années ce grammage a baissé au fur et à mesure - les pétroliers se sont bien gardés de nous le dire - pour atteindre, de nos jours, une concentration de 0,132 gr/L.
Il n'y a pas eu pourtant de raz de marée de culasses hors services. Pourquoi ? La protection des sièges et des soupapes est en rapport direct avec la concentration de plomb dans l'essence. Au fil des années ce plomb se dépose sous forme d'oxyde sur les sièges, assurant ainsi leur protection.
Cette protection demeure si une dose suffisante «de plomb» continue à entretenir son usure : c'est ce qui ce passe actuellement. Pendant des années le super fortement plombé a créé d'épais (pour l'image !) cousins amortisseurs sur les sièges de culasse. De nos jours, les pétroliers jouant sur l'effet mémoire de ce dépôt, l'entretiennent avec une dose minimum de tétrahéthyl de plomb. Mais, dés que l'utilisation du «sans plomb» sera effective, la protection ne sera pas entretenue et va disparaître.
D.R.
Les solutions
- La première, qui est à coup sûr la plus économique, est l'utilisation d'additifs, ou l'utilisation de carburant déjà additivé vendu à la pompe. Mais à condition de faire le bon choix.
- La seconde est la modification de votre culasse, en passant par la pose de sièges spéciaux (frettes).
- La troisième est une variante de la seconde : l'échange standard pour une culasse dite «sans plomb».
- Enfin la quatrième solution qui est radicale, luxueuse et qui n'est disponible que pour quelques véhicules : l'achat d'une culasse en aluminium traitée pour le carburant sans plomb.
Bien évidemment, pour les phases impliquant un démontage de la culasse, ces solutions n'ont pas les mêmes coûts. Car ils sont liés au produit en soi (nombre de cylindres, nature de la culasse) mais aussi, liés à la technicité du moteur. II est évident qu'il est plus facile de démonter une culasse de 4 Cv que celle d'une Jaguar XJS V12.
Quel carburant choisir ?
Hormis les véhicules d'avant guerre (la seconde) qui roulaient avec un carburant normal possédant un taux d'octane de 95 et par conséquent pouvant supporter le «sans plomb 95» additivé ou avec une culasse ad hoc, les véhicules postérieurs, qui roulaient avec un carburant ayant un taux d'octane recherché de 97, devront s'abreuver de «sans plomb 98» dont le taux d'octane recherché est le plus proche.
Toutefois, pour ceux dont les performances du véhicule ne réclament pas le «98» et qui, par souci d'économie veulent rouler au «95», il faudra modifier l'avance de leur allumage (en général en créant un retard de 5 à l0 ° en fonction des spécifications du constructeur).
En plus, et dans les deux cas, qui dit «sans plomb» dit carburant plus sec, plus corrosif pour les dérivés de caoutchouc. Pour cela, nous ne saurions trop vous conseiller de remplacer vos Durits actuelles, joints, membranes et tout autre élément à base de caoutchouc par leur équivalent neuf : les nouvelles refabrications étant déjà prévues pour supporter un tel carburant.
De toute façon, vos Durits et membranes sont probablement séculaires... N'oubliez pas, déjà à l'époque de votre auto on les remplaçait quasiment à chaque révision...
PREMIERE SOLUTION : les additifs (le point de vue des anglais)
Il n'y a aucun doute la dessus, l'automobile ancienne est davantage prise au sérieux outre-Manche que dans notre hexagone.
Rouler en «tacot» est un sport national. Ce n'est donc pas par hasard que la FHCV, Fédération Anglaise des Véhicules d'Époque, a organisé une campagne de tests sur les additifs, réalisés par le MIRA, la «Motor industry Research Association» équivalente de notre UTAC. ( on attend que la FFVE fasse de même... ndr)
Plus de 40 fournisseurs ont été contactés, dont 12 seulement ont accepté soumettre leur produit aux tests ! On peut d'ores et déjà se poser des questions sur les 28 autres ! A l'issue de ces tests, qui furent effectués sur des moteurs Rover série A (équipant, entre autres, les Austin Mini) tristement réputés pour leurs problèmes de récession des sièges, 4 produits ont été retenus et approuvés :
- Valvemaster,
- Superblend Zéro Lead 2000,
- Millers VSP Plus
- Red Line lead substitute.
Ce dernier étant, à ce jour, le seul produit commercialisé en France .
Le flacon de Red Line lead substitute. est vendu au prix de 160F TTC (port compris), permettant de traiter 454 litres d'essence. Ou bien, 999 F TTC (port compris) le carton de 12 flacons, permettant de traiter environ 5300 litres d'essence, ce qui engendre un surcoût de 18 centimes par litre de «sans plomb» traité. Gardez cette valeur en tête, elle nous sera fort utile par la suite.
DEUXIEME SOLUTION : modifier la culasse d'origine
(exemple à partir d'une MGB 4 cylindres)
La seconde solution consiste à modifier votre propre culasse. Passons sur le démontage qui n'est pas une opération très difficile, si vous avez la fibre mécanique.
Que faut-il exactement faire, quels éléments doit-on traiter ? Nous l'avons vu, le noeud du problème est la récession des sièges. Cette récession est intimement liée au grammage de tétrahéthyl de plomb, et s'avère être en corrélation directe avec la vitesse de rotation des moteurs et leur température de combustion.
Nos amis anglais ont pris l'habitude de ne traiter que les sièges des soupapes d'échappement en y apposant des frettes, ou sièges rapportés (sorte d'anneaux en acier spéciaux). Mais pas n'importe quelles frette : des frettes pour essence sans plomb et non les frettes d'autrefois que l'on utilisait pour réparer des sièges fissurés ou ayant dépassé les côtes de réparation.
Remplacer les 4 sièges de l'échappement (dans le cas d'une 4 cyl.) ne suffit pas, il faut aussi changer les 4 soupapes correspondantes car celles d'origine sont bien trop meubles.
Ces soupapes sont le plus souvent en acier spécial de type EN21/4N, mais encore faut-il avoir accès à la composition de leur métal : cela est rare, alors, dans ce cas, seul le prix reste un indice de qualité...
Fuyez donc les soupapes à bas prix. Reste alors à remplacer tous les guides pour éviter tout phénomène de collage ou de grippage car n'oublions pas que le «sans plomb» est peu lubrifiant.
En résumé il vous faut (pour un 4 cyl.) :
- 4 soupapes «sans plomb»
- 8 guides «sans plomb (au bronze de phosphore)
- 4 sièges «sans plomb»
Quelques sociétés vendent déjà ces éléments sous forme dé kits appelés lé plus souvent «kit sans plomb».
A titre d'exemple nous allons prendre tout au long de cet article le cas d'une culasse de MG B (Type moteur.18 v), avance anglaise en la matière oblige.
Ce kit est vendu, à titre indicatif, chez Motor Dream, 1343 F TTC. Auxquels il faut ajouter le prix de la pose par un rectifieur professionnel, et qui se décline ainsi :
- mise à l'épreuve de la culasse = 370 F HT
- pose de 4 sièges «sans plomb» = 760 F HT
- remplacement de 8 guides = 351 F HT
- rectification de 8 sièges = 570 F HT
- surfaçage (2 plans de joint) = 320 F HT
Nous arrivons ainsi à un total de 2371 F TTC. de main d'œuvre auxquels il faudrait encore ajouter un joint de culasse neuf et un joint de collecteur au minimum (environ 300 F dans notre cas).
Ce qui donne, pour le «passage au sans plomb» de notre culasse de MG B, un total d'environ 4500 F. C'est une somme ! mais quand on aime...
TROISIEME SOLUTION : la culasse "sans plomb"
Pour ceux que la recherche d'un rectifieur rebute, qui ont la chance de posséder une culasse aisément disponible, ou tout simplement qui veulent profiter de l'occasion pour s'offrir une culasse neuve, il reste la possibilité de l'échange standard vers une culasse sans plomb.
La culasse seule pour notre MG coûte, alors, 4656 F TTC. A première vue l'affaire semble économiquement équivalente. Mais attention ! La culasse que vous devrez restituer doit être en bon état, car en cas de culasse défectueuse (recalée à l'épreuve sous pression, fendue, hors cote, possédant des sièges trop fissurés, etc.) une majoration de l'ordre de 2 500 F vous sera appliquée ce qui porte le prix global, dans le pire des cas, à plus de 7300 F ! ! !
Il faut être sûr de son coup à ce prix la. En revanche, la culasse qui vous est livrée doit avoir 4 soupapes neuves, 4 frettes et 8 guides sans- plomb, 4 soupapes (normales) d'admission neuves ainsi que l'ensemble des ressorts (soit 16 ressorts), avec tous les sièges mis à la même cote afin de ne pas modifier les volumes de combustion.
Il se peut même que des frettes soient mises à l'admission lorsque les sièges d'origine se trouvent hors cote de réparation. De plus les deux plans de joints se voient surfacés alors que, la plus part du temps, seul le plan côté moteur est traité. Mais attention nous sommes ici dans le cas d'un échange standard sérieux, de qualité.
Ce n'est malheureusement pas toujours le cas. Si vous êtes sûr de la qualité de la culasse à échanger, si vous avez des garanties et si la qualité de la culasse livrée est effective, cette alternative reste envisageable, mais reconnaissez qu'il y a beaucoup de si...
QUATRIEME SOLUTION : luxe et beauté
Pour vous l'automobile de collection est une véritable passion, une déraison. Rien n'est trop beau pour votre auto.
Alors pourquoi ne pas vous faire plaisir et vous offrir ce qu'il se fait de mieux (dans le cas ou votre culasse n'est pas déjà en aluminium auquel cas vous vous retrouveriez dans le cas de l'échange standard) : une culasse en aluminium.
Il n'y a rien à dire la pièce est belle, digne d'une oeuvre d'art moderne, mais le beau se paye. Ainsi, pour notre MG B, la culasse alu traitée «sans plomb» atteints les sommets, soit 8835 F TTC : je n'ose penser aux 2 culasses d'une Jaguar V 12...
Cependant vous en aurez pour votre argent.
Grâce à ses qualités intrinsèques, l'aluminium à l'usinage aisé permet d'obtenir :
- de meilleures tolérances d'usinage,
- des conduits et des chambres de gaz améliorés (facilitant les flux d'où gain de puissance),
- un échange thermique supérieur (3 fois supérieur à celui de la fonte), - un gain de poids (influant énormément sur la tenue de route, sans parler des performances)
- de meilleures spécifications d'époque et actuelles liées aux petites séries de fabrication,
- un meilleur contrôle qualité toujours lié à «la petite série»
Sans oublier que l'on se trouve face à une pièce entièrement neuve et non à une fonderie d'époque, qui bien que mise à niveau peut être fatiguée. . voilà pour ce qui est du rationnel.
Mais posséder et rouler en ancienne est un acte passionnel. Il faut donc tenir compte de l'irrationnel, c'est à dire de la satisfaction visuelle, intellectuelle et quasi physique (avez-vous déjà touché une culasse alu ? c'est du bonheur !) de posséder un tel élément de luxe.
Cela doit être pris en compte au delà de toute considération économique.
QUE CHOISIR ?
Dans le cas de l'additif Red Line, le surcoût par litre d'essence traité était de 18 centimes. Notre culasse modifiée par un professionnel, ou en échange standard, avoisinait les 4 500 F dans le meilleur des cas : ce qui veut dire qu'il faudrait consommer plus de 25 000 (4500 / 0,18) litres d'essence additivée pour amortir une culasse modifiée, ce qui pour une auto consommant du 7 l au 100km représenterait plus de 350 000 km !
Une énorme gageure pour n'importe quelle auto moderne, alors pour une ancienne... Dans ces conditions, les solutions extrêmes ne seraient-elles pas les meilleures ?
Rouler au sans plomb additivé s'avère être la solution la plus économique là condition d'utiliser le bon additif, (à moins que vous vous sentiez l'âme d'un cobaye). Mais, à l'inverse, quitte à se faire plaisir avec une culasse modifiée, ce qui est de toute façon, un choix plus d'ordre intellectuel qu'économique, pourquoi ne pas «faire la totale» et s'offrir une culasse alu, au regard de la valeur ajoutée qu'elle représente en terme de performances et de prix de revente de l'auto. A vous de choisir...