Environnement : Renault a-t-il fraudé aux tests anti-pollution ?
Vincent Desmonts le 16/03/2017
« Renault : des voitures option pollution incluse » : l'article de Libération publié mardi soir, volontairement provocateur, a relancé la polémique sur un éventuel « Renaultgate ». Le quotidien s'est en effet procuré une copie du rapport que la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait transmis au Parquet de Paris, et qui a valu à Renault l'ouverture d'une information judiciaire pour « tromperie sur les qualités substantielles et les contrôles effectués ».
Dans ce rapport, les experts de la DGCCRF n'y vont pas par quatre chemins : « Renault SAS a trompé les consommateurs sur les contrôles effectués et notamment le contrôle réglementaire de l'homologation sur les émissions de polluants. » La Répression des fraudes accuse le constructeur d'avoir « utilisé une stratégie ayant pour objectif de fausser les résultats des tests antipollution ».
Le rapport relève ainsi des écarts importants entre les niveaux d'émissions mesurés en laboratoire (selon les tests d'homologation en vigueur) et ceux mesurés en conditions réelles. Ainsi, le Captur dépasse-t-il la norme de... 377 %! Pour la DGCCRF, cela ne fait pas un pli : « Ces résultats permettent de soupçonner l'installation d'un dispositif frauduleux qui modifie spécifiquement le fonctionnement du moteur, pour en réduire les émissions de NOx dans des conditions spécifiques du test d'homologation, afin que les émissions respectent les limites réglementaires. » En clair, un logiciel truqueur façon Volkswagen.
De son côté, Renault se défend d'avoir triché. Le constructeur, qui n'a pas eu accès au rapport, indique dans un communiqué « ne [pouvoir] en conséquence confirmer la véracité, l'exhaustivité et la fiabilité des informations contenues dans cet article. » La firme au Losange maintient par ailleurs « qu'aucun de ses services n'a enfreint les règles, européennes ou nationales, relatives à l'homologation des véhicules » et que « les véhicules Renault ne sont pas équipés de logiciels de fraude aux dispositifs de dépollution. »
Alors, tricherie ou optimisation ? Les normes d'homologation actuelles sont très sommaires, effectuées à l'aide de cycles peu réalistes (vitesses basses, accélérations très lentes, durée courte) et avec un protocole laissant beaucoup de marge au constructeurs (optimisation des lubrifiants, des pneumatiques, déconnexion des équipements électriques énergivores...). Par ailleurs, une faille réglementaire permet de brider les dispositifs antipollution de façon à éviter des dommages irréversibles sur la mécanique. Une clause de sauvegarde qui arrange bien les constructeurs...
Reste que les normes d'homologation vont bientôt se durcir. À partir du 1er septembre 2017, les nouveaux modèles seront testés suivant le protocole WLTP, avec un cycle plus représentatif de la conduite de tous les jours, et doublé d'une validation en conditions réelles (RDE). Dès lors, il sera plus compliqué de tricher...