Essai AUDI R8 4.2 FSI R Tronic
Jean-François Destin le 16/05/2007
Du salon à la route, du concept au modèle de série : Audi achève le 24 mai 2007 un tour de force technologique et industriel en lançant sa super sportive R8.
Présentation
Du salon à la route, du concept au modèle de série : Audi achève le 24 mai 2007 un tour de force technologique et industriel en lançant sa super sportive R8. Lorsque le prototype « Audi Le Mans » est apparu en septembre 2003 à Francfort, certains n'y ont vu qu'un coup médiatique, histoire de saluer les trois victoires déjà acquises par la marque aux 24 Heures du Mans. Mais à Ingolstadt, le projet était déjà presque figé dans le temps pour venir, dès 2007, défier Aston Martin, Mercedes mais surtout Porsche et sa mythique 911. La preuve : à quelques détails près, l'étude « Le Mans » et la R8 du commerce qui va s'échanger contre un chèque minimum de 106.900 € sont strictement identiques. Face au design extravagant des sportives italiennes et allemandes, Audi a su se démarquer. Epoustouflante par ses proportions et sa « musculature » à peine voilée, cette « dream car » hérite d'une poupe arrière magnifique mettant en scène les feux à diodes, les extracteurs d'air et les quatre échappements.
Une silhouette basse (1.25m à peine de haut), courte (4.43m) mais surtout très large (plus d'1.90m) pour se poser massivement sur la route et offrir deux places généreuses aux occupants : l'Audi R8 en impose même à l'arrêt. Sa carrosserie en aluminium et magnésium abrite un châssis cage ASF (Audi Space Frame), un V8 de 420 chevaux (celui de la RS4) en position centrale arrière et la fameuse transmission Quattro. Avec 301 km/h en pointe et moins de 5 secondes pour passer de 0 à 100 km/h, elle va faire trembler la concurrence tout en montrant une docilité et une facilité de pilotage stupéfiantes.
Design
Regard froncé sur l'horizon, gueule béante et ouïes démesurées : à l'arrêt comme en mouvement, l'Audi R8 parait concentrée sur sa mission de sportive sans concession. Un somptueux trompe l'œil dans la mesure où dès les premiers kilomètres, le conducteur apprécie un comportement dépourvu de toute sauvagerie ou brutalité. Audi dont les racines sportives remontent aux fameuses Auto Union de l'entre deux guerres n'a pas raté son entrée dans le cercle très fermé des « dream cars ». En remettant en scène à l'avant sa fameuse calandre « Single Frame » et en adoptant un arrière compact légèrement relevé dans la continuité d'un pavillon volontairement galbé, elle se veut accueillante presque spacieuse pour deux.
Les optiques comme les feux bénéficient d'une guirlande de leds électroluminescents. Equipant déjà l'Audi A6 Avant, cette technologie, annoncée commune à tous les modèles à venir, va devenir la nouvelle signature visuelle, Audi souhaitant qu'on repère immédiatement la marque même de nuit.
Dès l'apparition du concept « Le Mans », on s'est étonné de cet étonnant flanc contrasté « argent » entre la portière et l'aile arrière derrière les prises d'air latérales. Les stylistes parlent de « slide blade » mais n'expliquent pas tellement la présence de cette découpe verticale. Fort heureusement, les clients pourront la choisir parmi huit coloris, celle de notre voiture d'essai, en harmonie avec la teinte de la carrosserie se montrant discrète.
En revanche, le capot translucide permettant d'admirer à l'arrière le V8 FSI fera l'unanimité. Contre un supplément de 3500 €, le 4.2l doté de couvre culasse assorti des 4 anneaux en relief peut même être éclairé la nuit ! Mais pour ce tarif, on a droit aussi à de magnifiques caches en carbone.
Enfin juste derrière le compartiment moteur se relève un aileron mobile augmentant l'appui en fonction de la vitesse.
Habitacle
Dans le dossier de presse R8 relatif à l'habitacle, Audi se targue d'avoir amené la technologie du sport dans la rue. En illustration une superposition du poste de conduite de la LMP1 R8 des 24 Heures du Mans et de celui de la R8 du commerce. On voit bien que si l'esprit est là, la démarche a tenu compte du minimum d'éléments de confort exigé par la clientèle des voitures de sport de haut de gamme.
Seulement fonctionnelle et dépouillée, la planche de bord du proto de course fait appel aux vieilles recettes des boutons poussoirs ou basculeurs, aux plastiques basiques et à une présentation spartiate. Seuls des éléments en carbone, un matériau magique d'allègement, se retrouve sur les deux véhicules. Sur l'Audi R8 de série, l'ambiance course a été préservée par un volant aplati à sa base et un dessin du cockpit de commande tourné vers le pilote. Pour le reste, on tente de justifier les 106.900 € par l'alliance du cuir et de l'aluminium, omniprésent autour des cadrans (zone rouge à 8000 tours et graduation jusqu'à 350 km/h) et au niveau de toutes les commandes y compris sur le levier de la boite robotisée. Cependant le pédalier troué de notre R8 d'essai y a droit à condition de payer l'option à 370 €. Mesquin.
L'espace dévolu aux occupants a été généreusement calculé pour y installer des sièges semi-baquet exemplaires à tous points de vue. Confortables et ergonomiques, ils assurent un excellent maintien latéral même à forte cadence et offrent une position de conduite parfaite. Malgré la présence du V8, Audi a pu ménager un mini espace de rangement pour les clubs de golf si chers aux Américains derrière les sièges. Cela permet de loger un blouson, un attaché case ou deux petits sacs car les rangements à bord sont rares et minuscules et le coffre réduit à 100 dm3 sous le capot avant !
Quant à la visibilité arrière, elle est quasiment nulle en dépit de la grandeur des rétros extérieurs. Le système acoustique arrière d'aide au stationnement lui aussi absent de l'équipement de série ( !) est obligatoire mais rallongera la facture de 920 €.
Châssis
Audi a respecté à la lettre les critères de la voiture de sport idéale. A savoir des voies larges (1.632m à l'avant et 1.595m à l'arrière), un empattement long (2.65m), une répartition avantageuse du poids (44% à l'avant et 56% à l'arrière), un V8, en position longitudinale centrale arrière et des pneus énormes (235/40 à l'avant et 285/35 à l'arrière) sur des jantes de 18 ou 19 pouces. Pneus développés spécifiquement par Pirelli. A cette architecture tout en équilibre s'ajoutent une coque ultra légère (277 kg), des structures en alu très rigides composées de 70% de profilés, 22% de tôles d'alu et 8% de pièces moulées, et bien entendu des suspensions triangulés double à l'avant et à l'arrière. Réglées fermes, ces dernières se montrent moins confortables que celles d'un 911 sans toutefois réellement maltraiter les occupants. En option ( !) à 2100 €, Audi propose le « Magnetic Ride », une suspension pilotée du réglage de l'amortissement. Malheureusement, nous n'avons pas pu l'essayer. Côté transmission intégrale, le système retenu, proche de celui de la Lamborghini Gallardo fait appel à un viscocoupleur central capable d'envoyer de 10 à 35% du couple sur les roues avant en fonction de l'adhérence.
A la lecture de cette description technique, on comprend mieux les raisons d'un comportement routier d'une rigueur absolue. Même en débranchant le contrôle de trajectoire, il est quasiment impossible, hors circuit, de voir l'auto entamer un travers brutal et afficher une quelconque vulnérabilité en tenue en cap à haute vitesse. Les « porschistes » habitués à surveiller le train arrière de leur 911 estimeront peut-être que la conduite de la R8 manque de piment mais elle saura convenir en usage quotidien.
La direction que nous aurions aimée plus directe se montre bien adaptée à la conduite sportive et les freins surdimensionnés font appel à d'énormes disques et à des étriers à 8 pistons.
Moteur
A travers la magnifique vitrine arrière de la R8, on admire le récent V8 FSI déjà installé dans les RS4 berline et cabriolet. Puissance et couple sont identiques (420 chevaux et 430 Nm) mais le graissage par carter sec a permis ici d'abaisser le centre de gravité au profit de l'agilité et de l'équilibre de la voiture. Maintes fois éprouvé aux 24 Heures du Mans, le système d'injection directe FSI est associé à un concept de haut régime innovant. De 7800 tours/m, le régime maxi passe cette fois à 8250 tours/m sans pour autant remettre en cause la souplesse et les reprises à très faible allure.
Compact et léger, ce V8 glouton à forte cadence (près de 23 litres pendant nos essais !) se contente d'une quinzaine de litres en croisière sur l'autoroute. Les 420 chevaux s'expriment au travers d'une boite mécanique ou robotisée à 6 rapports. Bien entendu, faute d'un galop d'essai sur un circuit, il ne nous pas été possible d'aller taquiner les très hautes vitesses mais sans être foudroyantes, les accélérations s'avèrent tellement toniques que les 301 km/h annoncés ne sont pas virtuels. A noter que c'est la première fois qu'Audi rompt l'entente tacite des constructeurs allemands visant à ne pas commercialiser de voitures dépassant les 250 km/h.
A la question : le V10 de 520 chevaux de la Gallardo (Lamborghini appartient au groupe) sera-t-il monté dans les flancs de la R8 ? La réponse embarrassée d'Audi montre que rien n'est exclu.
A lire aussi : les concurrentes
Sur la route
En s'installant à bord d'une voiture de sport, on s'attend toujours à devoir se contorsionner et composer avec un baquet peu accessible (comme dans la Porsche 911 GT3). C'est tout le contraire avec l'Audi R8 même si on se retrouve assez près du sol. La position de conduite est quasi idéale, la garde au toit très satisfaisante et les sièges, exemplaires d'ergonomie, de confort et de maintien invitent aux longues étapes. Toutes les commandes ont été étudiées pour rendre la conduite facile et précise.
Avec une telle cavalerie dans le dos, on brûle d'envie d'en découdre. Notamment pour savoir si l'Audi la plus sportive de la gamme mérite bien son accession au sommet. La réponse est surprenante car Audi a joué davantage la carte de la GT puissante que du roadster pointu à sensations. Attention l'ambiance n'est pas si feutrée surtout lorsqu'on décide de solliciter le V8 et la commande séquentielle de la boite robotisée. Très facile à prendre en main et d'une rigueur de comportement absolue (même sous la pluie), l'Audi R8 montre sa maniabilité, son relatif confort et son efficacité. En appuyant sur la touche « sport », de la boite, on peut aussi gagner quelques millisecondes sur les changements de rapports, histoire d'écœurer encore davantage les autres usagers qui viennent d'être doublés.
Sans aucune intervention du conducteur, le système Quattro répartit la puissance sur les deux essieux en fonction de l'adhérence, le viscocoupleur central se chargeant d'envoyer sur le train avant de 10 à 35% du couple disponible. La R8 affiche donc le caractère d'un modèle à propulsion sans que son pilotage soit délicat.
Standing et luxe oblige : l'insonorisation a été soigneusement travaillée mais le V8 avec ses accents de turbine transcende le conducteur, un petit renvoi automatique de régime ponctuant la remontée de chaque rapport en mode séquentiel. Comme si vous réussissiez parfaitement le fameux pointe/talon ! C'est très excitant mais gare aux excès de vitesse.
À retenir
—
20
- Accélération
- Reprises
- Direction
- Agilité du châssis
- Position de conduite
- Commande de boîte
- Etagement de la boîte
- Adhérence
- Freinage
- Equipements de
sécurité
- Habitabilité
- Volume du coffre
- Visibilité
- Espaces de rangement
- Confort de suspension
- Confort des sièges
- Insonorisation
- Qualité (matériaux, assemblage, finitions)
- Rapport prix/prestations
- Tarif des options
- Consommation