Essai ALFA ROMEO GT
Jean-François Destin le 09/02/2004
La firme milanaise se devait, avec la nouvelle Alfa Romeo GT, de faire référence à son passé tout en repassant commande aux studios Bertone.
Présentation
Contrairement aux années 60 où Nuncio et son équipe sous-traitaient entièrement le dessin de la carrosserie, cette fois, les artistes de chez Bertone ont travaillé en liaison étroite avec ceux du centre de style Alfa. Ramassé, compact, dynamique, le GT de 2004 ressuscite à merveille cet esprit Alfa déjà bien ranimé par la 156. Pas de fioritures, pas d'artifices faciles pour une sportivité qui doit s'exprimer même à l'arrêt.
Pour Alfa, ce GT doit renforcer l'image de la marque tout en proposant un modèle quasi exclusif, les coupés sportifs à 4 places restant un sous-segment peu exploité par les constructeurs. Attention tout de même à Peugeot qui après avoir défriché sérieusement le terrain avec son coupé 406 à succès met la dernière main à un coupé 407 Elixir attendu courant 2005.
La marque au trèfle dispose d'une quinzaine de mois pour s'emparer de 70% d'un marché français du coupé estimé à 11.000 unités par an ! Un pari gagné d'avance grâce, bien sûr, à une silhouette très attractive mais aussi à une gamme fournie et en rapide évolution. Reprenant la plate-forme de la berline 156, le coupé Alfa Romeo GT est proposé au lancement avec trois motorisations : un quatre cylindres 2 litres de 165 chevaux, un 6 cylindres 3.2l de 240 chevaux et un diesel 1900 cm3 «common-rail» de deuxième génération porté à 150 chevaux. Hélas, signe des temps, c'est avec ce moteur qu'Alfa France compte réaliser les trois quarts de ses ventes, les concurrents (Peugeot et BMW) livrant eux aussi plus de 65% des coupés 406 et Série 3 en diesel.
Dans le courant 2004, Alfa France proposera une version GT Lusso plus luxueusement équipée et une version d'entrée de gamme animée d'un 1800 cm3 Twin Spark. Entre temps a été présentée au Salon de Genève (début mars) l'Alfa SW « Allroad », sorte de break SUV à caractère sportif.
Pour l'heure, Alfa France qui travaille actuellement sur une croissance du réseau commercial, sur de nouvelles identifications pour les ateliers et les show-rooms et sur une garantie « Top Care » de 5 ans s'apprête à livrer les premiers Alfa Romeo GT. Les prix s'échelonnent de 28.300 € pour la 2.0 JTS Distinctive à 37.000 € pour la 3.2l V6 Selective.
Design
Pour décrire la silhouette du nouveau coupé GT, point besoin de discours alambiqués. La pureté des lignes, une certaine élégance à l'Italienne et une tradition sportive s'inspirant de celle des coupés de légende d'autrefois sautent aux yeux. A l'arrêt, le GT dégage une impression de puissance contenue tandis qu'en évolution, il semble avaler la route avec gourmandise. On verra plus loin que cet équilibre visuel dû à une hauteur mesurée, à des voies larges et à des porte-à-faux réduits se traduit par un comportement d'une grande rigueur mais enthousiasmant. A l'avant, on retrouve la calandre Alfa un peu redimensionnée, deux grandes prises d'air et des groupes optiques spécifiques débordant en arrière sur les ailes.
L'arrière, simple mais réussi, arbore des feux dans la lignée de ceux de la 156. Les deux grandes portes facilitent un peu l'accès aux places arrière, les sièges avant s'avançant automatiquement lorsqu'on bascule les dossiers. L'installation réclame néanmoins une bonne souplesse. La bonne surprise vient d'un hayon qui s'ouvre sur un coffre dont la capacité de 320 dm3 au départ évolue en rabattant les sièges arrière (banquette 2/3 1/3).
Habitacle
Pour les stylistes, le casse-tête des coupés 4 places vient du fait de pouvoir accueillir deux personnes à l'arrière tout en conservant une faible hauteur de pavillon propre à ménager la silhouette mais aussi le coefficient aérodynamique. Un compromis trouvé honorablement par Alfa même si des personnes de grande taille devront rentrer un peu la tête dans les épaules pour s'installer. En revanche, la place pour les jambes reste correcte tout comme la largeur aux coudes (un accoudoir permettant d'affiner sa posture). Reste qu'à ce niveau, le coupé 406 plus long et large offre des places arrière plus généreuses et confortables.
Pourtant plus soigné et fini que celui d'une 156, l'intérieur déçoit un peu par l'emploi de certains plastiques pas très haut de gamme et surtout par l'implantation du tableau de bord de la 147. En son temps, Peugeot avait été critiqué pour avoir réalisé la même économie en reprenant telle quelle la planche de la berline 406. Sur l'Alfa GT, je regrette aussi la reprise de ces cadrans trop profondément enfouis dans ces culots à l'ancienne, un choix rendant la lecture diurne difficile surtout par temps ensoleillé. Une bonne note pour les sièges, accueillants, moëlleux et assurant un bon maintien latéral du corps en conduite sportive.
Châssis
En plus de sa plate-forme, le coupé GT reprend de la berline 156 les liaisons au sol à ceci près que la suspension avant opte cette fois pour un quadrilatère "haut". Cette géométrie souvent difficile à bien régler permet d'obtenir une tenue latérale optimum du train avant, une direction précise et réactive et une bonne motricité tout en filtrant les remontées dues aux irrégularités des revêtements. A l'arrière, le GT bénéficie d'un système Mc Pherson à bras asymétriques tandis que la liaison au châssis est assurée par une traverse en alu solide et légère.
Privilégiant le plaisir de conduite, Alfa Romeo n'a pas multiplié les assistances électroniques. Cependant, pour garantir la sécurité active de tous les clients, le VDC (Véhicle Dynamic Control) est monté en série. Associé au freinage d'urgence et au MSR qui module le couple de freinage lors de brusques rétrogradages, cet ESP surveille l'excès d'optimisme du conducteur en détectant (en en jugulant) tout dérapage du train avant ou arrière. Dans les cols de l'arrière pays niçois, nous avons pu constater qu'il savait se montrer discret et efficace tout comme le MSR dont le rôle est d'éviter un blocage de roues dû au renversement de couple généré par un rétrogradage inopportun.
Moteur
De tout temps réputé pour ses moteurs brillants, Alfa Romeo entretient le mythe par une proposition mécanique large et riche. Nous avons pu essayer tour à tour le 6 Cylindres 3.2l de 240 chevaux au souffle inépuisable (quel plaisir de l'écouter chanter sous le passage des tunnels de la moyenne corniche !), le 2 litres de 165 chevaux dont la puissance apparaît suffisante et agréable et enfin le diesel JTD retenu, selon les prévisions par les trois quarts de la clientèle.
Dérivé du bien connu 3 litres 24 soupapes, le 3.2l de 240 chevaux équipe déjà les Alfa GTV et Spider et la nouvelle 166. Il se caractérise par sa souplesse et sa large plage d'utilisation pour une conduite à la fois sportive et tranquille au quotidien.
Le 4 cylindres 2l de 165 chevaux ne démérite pas, loin s'en faut, en montrant également de bonne reprises à bas régime et un rapport agrément/consommation intéressant. Cette mécanique autorise 216 km/h en pointe et un 0 à 100 km/h en 8,7s tandis que la consommation mixte n'excède pas les 8,7l.
Enfin le 1900 cm3 JTD de 150 chevaux n'est autre que le diesel deuxième génération monté en version 140 chevaux sous le capot des 147, 156 et break Sportwagon. Tonique, endurant et sobre (6,7l en cycle mixte), il serait parfait s'il se montrait moins bruyant au ralenti et à l'accélération sur les premiers rapports. Sans parler des vibrations remontant dans le levier de vitesse.
Côté transmission, il faut louer la boite mécanique à 6 rapports (étagement, commande précise et sélective) mais beaucoup moins l'automatique Selespeed proposée curieusement sur la seule 2.0 JTS 165 ch contre un supplément de 800 €. Non seulement, la rapidité des changements de rapports (avec palettes sous le volant) n'a pas réellement progressé mais la boite a une fâcheuse tendance à supplanter vos décisions en imposant ses lois de passage. Enfin, passer en marche arrière et revenir ensuite en marche avant réclame du doigté et surtout de la patience.
Sur la route
La grande réussite du coupé GT est de restituer un parfum sportif à l'Italienne propre à Alfa Romeo. Une sensation indéfinissable de brio et d'envie de piloter que l'on ne retrouve pas au volant des coupés concurrents. Au delà des critiques formulées à l'encontre du diesel et de la boite Selespeed et d'un confort de suspension très relatif (mais à notre sens acceptable sur un coupé aussi typé), le pilotage du GT ne peut pas laisser indifférent. Les raisons en sont multiples : la sonorité, le punch et les performances des moteurs à essence bien sûr mais aussi et surtout le comportement rigoureux mais joueur du châssis à l'attaque des portions sinueuses.
Dépourvue de roulis, l'auto vire à plat en restant rivée sur sa trajectoire et il faut vraiment exagérer pour déclencher l'amorce d'un sous-virage et les contre-mesures du VDC. Suffisant aux allures normales, le freinage m'a paru s'altérer en usage intensif. En revanche, une note maximum pour la direction qui permet de placer le train avant au millimètre près.
Equipements
La finition de base Distinctive comprend : 6 airbags, l'ABS avec EBD et aide au freinage d'urgence, le VDC, l'antipatinage, l'ordinateur de bord, le correcteur d'assiette électrique des phares, le volant cuir réglable en hauteur et profondeur, la banquette arrière rabattable 2/3 1/3, la climatisation automatique dual Zone,le régulateur de vitesse, la sellerie en Alfatex et les jantes de 16 en alliage léger.