La Carrosserie Ghia
Avec Giugiaro, Touring, Pininfarina et Bertone, Ghia est l’autre grand de la carrosserie italienne. C’est aussi l’une des plus anciennes maisons de la péninsule.
sommaire :
FIAT 2300 S
Gilles Bonnafous le 22/03/2005
Créé à l’initiative de Ghia alors sous la direction de Luigi Segre, le coupé Fiat 2300 S apparaît comme l’une des plus brillantes GT 2 + 2 européennes de moins de trois litres. Méconnue, cette superbe voiture mérite d’être tirée de l’injuste anonymat où elle est recluse. Son péché ? S’appeler Fiat. La même amnésie frappe le coupé Dino du constructeur turinois, magnifique voiture oubliée de la cote et des collectionneurs. Badgées Alfa Romeo ou Ferrari, ces automobiles seraient depuis longtemps sous le feu des enchères…
D.R.
D.R.
A la fin des années cinquante, Ghia cherche à sortir de la fabrication de séries confidentielles pour passer à la production de modèles pour le compte des grands constructeurs. Mais à la différence des concurrents Pinin Farina, Bertone ou Touring, le coupé Fiat 2300/2300 S sera l’une des rares Ghia construites en série par la firme (la Karmann-Ghia étant produite par le carrossier d’Osnabrück).
La Fiat 2300 S, c’est d’abord un chef-d’œuvre d’élégance et d’équilibre. Originale et bourrée de caractère, sa ligne est due à Tom Tjaarda, un jeune designer américain formé à l’université du Michigan et arrivé chez Ghia en 1959 à l’âge de 25 ans. Ses lignes tendues et son profil étiré confèrent à la voiture une personnalité éminemment sportive, tout comme sa face avant aussi expressive que dépouillée. Le pavillon aux montants d’une grande finesse favorise une remarquable visibilité, tandis que le traitement de la custode offre à la lunette arrière un caractère hyper-panoramique. Le trait singulier de ce dernier tient aux montants qui retournent vers l’avant dans un mouvement parallèle au pare-brise. Cette formule sera reprise sur le coupé italo-américain Dual 6,4 litres (mais en moins développé).
D.R.
Les berlines Fiat six cylindres lancées au salon de Turin de 1959 constituent la base du coupé 2300 Ghia. Cette génération de voitures bourgeoises, dessinées par Pinin Farina, sont proposées en cylindrées de 1800 cm3 et 2100 cm3. Conçu par le célèbre ingénieur Aurelio Lampredi, dont c’est la première réalisation depuis qu’il a quitté Ferrari, leur six cylindres en ligne à arbre à cames latéral bénéficie d’une technique assez sophistiquée. La culasse en alliage léger abrite notamment des chambres de combustion polysphériques.
Coupé 2100 D.R.
2300 S D.R.
Fort de ses liens historiques avec Fiat, Ghia soumet au constructeur turinois un projet de coupé 2100 S 2 + 2 qu’il présente au salon de Turin 1960. Le carrossier saura convaincre Fiat de l’inscrire à sa gamme, grâce notamment à sa qualité de réalisation. Revisité par Carlo Abarth, qui en sortira 140 ch, le coupé 2100 S sera construit chez OSI.
La carrière de cette voiture sera de courte durée, car dès la fin 1961, le coupé reçoit le moteur 2,3 litres de la berline 2300, qui succède à la 2100. Il est alors proposé en deux variantes de puissance, 2300 et 2300 S. La version de base hérite du moteur de la berline (117 ch SAE et 175 km/h). Elle sera peu diffusée et retirée dès 1964.
D.R.
D.R.
Confiée à Abarth pour subir une cure de vitamines, la 2300 S bénéficie d’une culasse retravaillée et de deux carburateurs Weber double corps (au lieu d’un seul). Avec 150 ch SAE, soit environ 130 ch DIN, elle file à 195 km/h. Pour faire face à ce surcroît de puissance, les freins reçoivent le renfort de quatre disques. Plus performante que le coupé Lancia Flaminia Touring 2,5 litres, la 2300 S est la concurrente directe de l’Alfa Romeo 2600 Sprint Bertone. Esthétiquement plus racée et plus rapide en accélérations que sa rivale italienne, elle offre l’agrément de son moteur pointu, puissant et souple. Sans parler de sa sonorité envoûtante…
D.R.
D.R.
Les qualités de la 2300 S ne s’arrêtent pas là. Elle jouit également d’une excellente finition, avec un superbe tableau de bord, un magnifique volant Nardi et un repose-pieds passager digne des plus luxueuses GT. Signalons encore qu’un cabriolet exposé au salon de Turin 1962 ne dépassera pas le stade du prototype.
Elegante, raffinée, vive et rapide, la 2300 S pâtira d’un traitement indigne de son talent. Mal vendue par le réseau Fiat, elle s’effacera en 1968 au profit du coupé Dino, un autre modèle bourré de qualités mais dont la carrière commerciale ne sera pas plus brillante. Il ne fait pas bon s’appeler Fiat quand on est une belle GT…
Prototype 2300 S cabriolet D.R.
Break de chasse, 1962 D.R.